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Chroniques du cercle : Corruption

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Ceci est le dernier épisode de cette saison des chroniques du cercle, enjoy.
Edit : Vous trouverez une saison 2 dans l'EDC de Kelvin.
Corruption
"En politique le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal."
La Justice. L’Équilibre. L'Honneur.
Autant de mots qui n'ont de valeur que ce que l'on veut bien leur donner.
Subjective...
Contrairement à ces valeurs qui ne trahissent pas, où tout le monde s'accorde à force de raison ou de coups de tatane : les intérêts de l'Empire, la Loi. Un véritable impérialiste ne s’embarrasse de rien d'autre que cela : les BONS VIEUX INTÉRÊTS DE NOTRE BON VIEIL EMPIRE... ET SES BONNES VIEILLES LOIS !
L'intelligence artificielle antique occupait depuis plusieurs années une place prépondérante dans ma vie. Mais ça, n'importe quel lecteur de ces chroniques pouvait l'avoir remarqué.
"Rolala, mais qu'est-ce qu'il peut être énervant avec cette 'Vitalia'... Vitalia par-ci, Vitalia par là. Oh, eh, dis donc, Vitalia ! Qu'est-ce que t'en penses ? ... Ils vont finir par se marier."
...et ça ne risquait pas de changer. Elle avait été programmée pour nous comprendre, pour nous classer, nous anticiper. Un inspecteur virtuel, traqueur irréprochable, le meilleur profiler évolutif des neuf secteurs, capable de retrouver un traitre planqué au beau milieu des bas-quartiers labyrinthiques du nouvel Empire rien qu'en étudiant les notes qu'il avait eu à l'école de police dans sa jeunesse. Oui, elle était forte, et cette capacité à comprendre les humains sans partager la moindre émotion avec eux faisait d'elle une excellente psychanalyste.
- Je n'y crois plus.
- Pourquoi ?
Sans aucune hésitation, je répondis dans la plus totale des confidences. Les machines ne trahissent pas. Je répondis ce même discours qui fut prononcé à deux autres personnes, presque mot pour mot. Le 'grand secret' qu'il m'était impossible de garder au silence, en perspective de l'échec à venir. Avec si peu de temps devant moi, tout cela ne pouvait mener qu'à un échec. Les dernières nouvelles de Sharon... la 'passeuse' du centre de clonage, étaient catastrophiques. A force de clonages, de ratages, et en raison d'un âge bien trop avancé pour un être humain, mon ADN était devenu un véritable champ de bataille. Chaque nouvelle mort pouvait réserver son lot de mauvaises surprises, chaque restructuration coûtait un prix exorbitant, suivant une loi exponentielle qui ferait pâlir des statisticiens comme Valstik ou Callaghan, ou les fonctionnaires de la DAI s'ils venaient à l'apprendre.
- Quand tu trouves le gouvernement, et le pouvoir actuel injustes... trois choix s'ouvrent à toi. Le premier : se soulever, devenir un ennemi déclaré du despotisme à l'origine de tes indignations. Second choix : Rester chez soi et ne rien faire, pleurer lorsque les forces de répression de ce gouvernement injuste défoncent ta porte et ruinent ta vie. Le troisième choix... c'est de se lancer dans la politique, en espérant changer les choses de l'intérieur.
- C'est un discours dissident. Répondit calmement la gardienne matricielle du CDO.
- Exact, mais nous avons conclu un marché.
- Vous avez donc choisi la troisième option.
- Tu sais Vita... le monde n'est pas gouverné par des lois écrites, mais par des hommes. Certains se soumettent aux lois, d'autres pas. Le monde dépend de chaque individu, et de ce qu'il en fait. Et il faut aussi une bonne dose de chance pour que personne ne transforme ta vie en enfer. L'essentiel c'est d'avoir des valeurs fortes et de s'y tenir. Mais ces valeurs... je n'y crois plus. En voulant trop jouer au politicien, j'ai été... corrompu.
- De quelle corruption parlons-nous ?
- Pas de l'argent, ni du... pouvoir. Des idées. J'ai été corrompu par ce que je combattais. Je suis devenu l'impérialiste ultra que j'ai toujours détesté, au point d'en devenir...
Le bureau déjà bien luxueux du Cercle de l'Orient avait laissé sa place au gigantesque bureau Impérial de l'Ambassade. Magnifique, majestueux. La moitié du PIB du secteur rebelle rien que pour arroser les plantes venues tout droit de l'Hortus, à coup de lotion anti-radiations et d'engrais synthétiques de croissance à répulsif d'écureuils.
- ...Ambassadeur.
L'hologramme de Vitalia, projeté par ce mini-générateur portable qui ne me quittait jamais, afficha un sourire encore plus radieux, préparant sa tirade. Lord Devdas avait-il conscience que j'utilisais sans scrupule l'IA de son organisation ? Il devait avoir d'autres problèmes à régler j'imagine.
- Comment un brave justicier plein d’avenir aurait pu devenir le Legatus ultra-nationaliste et Humain-radicaliste que l'on connaît ?
Votre histoire est celle d'un homme brillant aux compétences martiales reconnues qui aurait ainsi vu de plus en plus de responsabilités lui être confiées, jusqu’à devenir l’une des pièces maîtresses de l'Empire face aux menaces diverses. A force de guerres et d’horreurs, il aurait doucement sombré : d’abord, il aurait compris que l’on fasse exécuter les espions, par exemple. Puis, justifié l’utilisation de la torture des prisonniers pourvu que celle-ci préserve la vie de ceux sous ses ordres. Par la suite, il aurait découvert l’importance de fusiller quelques déserteurs pour l’exemple, et de fil en aiguille, serait devenu d’une efficacité brutale et sans éthique.
Corrompu de fait par son parcours sanglant qui devait à la base défendre les intérêts d’un Etat de principes, il aurait voulu à son tour que l'Empire se défasse de tout ce qui l’affaiblissait : libertés, droits, expressions… jusqu’à devenir lui-même un dictateur en puissance. Au final, nous avons ici l'histoire somme toute assez classique sur la possible corruption du plus vertueux des hommes une fois mis face à l’horreur de la guerre, et des intérêts de l'Empire.
- Tu apprends vite.
J’éteignis le générateur portable, renvoyant l'IA à son cœur situé dans les sous-sols du CDO, comme un adolescent envoie une boulette de papier à son camarade de classe lors d'un cours en ingénierie mécanique à l'Académie.
La réalité m'avait frappé en plein visage, corrompant le seul œil intègre qu'il me restait. Il était impossible d'avoir un Empire à la fois parfaitement Juste et... efficace.
Je n'étais qu'un équilibriste avançant sur un fil tiré d'un côté par un peuple enragé, et de l'autre par une Noblesse engagée, elle avait parfaitement raison. Comme quoi, l'IA n'était peut-être pas la seule à pouvoir encore m'enseigner quelque chose dans cette ville.
La plaque de Commissaire du Cercle de l'Orient m'adressa un dernier reflet doré avant de disparaître pour longtemps dans l'un des tiroirs du bureau Impérial. Il n'était plus question de jouer au Justicier : ce mandat allait être un subtil jeu d'équilibre, advienne que pourra.

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Références, citations :
  • Machiavel
  • Mafia : The City of Lost Heaven
  • Odieux

◊ Commentaires

  • Swan~3150 (689☆) Le 29 Janvier 2013
    J'ai beaucoup aimé. Je citerai bien une de ces réflexions..mais elles sont toutes très bonnes.

  • Manerina~6356 (1552☆) Le 29 Janvier 2013
    Bientôt "Les chroniques de l'Ambassade" smiley

    Et dire que je viens d'écrire un texte qui s'appelle "Équilibre"... J'hésite du coup smiley

  • L-X (1536☆) Le 29 Janvier 2013
    Elle ne t'a pas dit? Tu devras jongler en même temps...

  • Zartam (851☆) Le 29 Janvier 2013
    Et cracher du feu.

  • L-X (1536☆) Le 29 Janvier 2013
    Ouais mais ça, c'est de base, c'est naturel ! Trop facile!

  • Halinna~20755 (60☆) Le 29 Janvier 2013
    De l'idéalisme... au réalisme. smiley

  • Grypium~23119 (248☆) Le 29 Janvier 2013
    Zartam grandit, voit la réalité en face, c'est beau..

  • Zartam (851☆) Le 29 Janvier 2013
    Tout dépend de notre définition de la grandeur.

  • Krix_Thuil~20861 (74☆) Le 29 Janvier 2013
    Ouais, pour grandir il y'a encore de la place, et à la fin, il y'a que de la déchéance ...