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EDC de Yonbaïke~41026

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Coup d'vieux

Coup d'vieux




La cuve s'ouvre dans un chuintement, la petite piaf en sort sans glamour, sacrifie au rituel de vomir sur le bas-côté. S'essuie la bouche avec son avant-bras, se dirige vers la sortie d'un pas un peu hagard, là où le concierge s'appuie sur son comptoir.

-Faut m'rendre mon trench. Et mes autres affaires, aussi.

Il lui lâche un sourire goguenard, avant de fouiner dans les casiers en quête du bien convoité. C'est la troisième ou la quatrième fois qu'il la voit sortir à poil ; il la trouve moche, elle le trouve moche, il la mate, plus par habitude que par envie, elle s'en fout, en un sens, leur relation est plus saine que la moyenne.


-Les cures de froid successives te rendent pas plus aimable, la vieille. Tiens ! Voilà toutes tes affaires, et j't'ai rien piqué. Pas qu't'aies eu grand-chose... J'te jure, jamais vu un tel panier percé. Autant d'temps en Ville, et y'avait que dalle dans tes poches.


Haussement d'épaules indifférent. La vaut' s'enrobe dans son trench trop large, avant même de remettre le reste de ses oripeaux (dont l'habituel minishort qui ne va ni avec son manteau, ni avec son absence de galbe fessier), inspire profondément l'odeur résiduelle de vieux cuir, puis saisit son deck, l'air vaguement ennuyée.


-T'gâches l'odeur d'Lado à chaque fois qu'tu l'tripotes. C'est mon Trench, faut arrêter. S'pas correct de tripoter les affaires des gens.

-Hey, la relique, toi c'est dans les organes et les crédipuces des gens que tu tripotes, alors à ta place j'la ramènerais pas.
-...
-Puis les vaut ont un odorat d'merde. Vient pas m'les tanner avec ton odeur de kobolde fantasmée.
-Han...

Voilà l'une des caractéristiques aussi vautourdes que prodigieusement énervantes de Yonbaïke : sa capacité à radicalement ignorer ses interlocuteurs et leurs ressentis au profit de ses priorités de l'instant. En l'occurence, fouiner dans son deck et dans ses dossiers.

-Kananera décédée, Cryx en cryo... 'rdel de Trench, tous les emmerdeurs d'objecteurs d'conscience s'sont tirés ? Bah v'là où ça mène hein l'idéalisme. « L'inconstance est la marque du génie véritable ». J'sais plus qui a dit ça...
-Personne. Tu l'as bricolé à l'instant. Et oui, les scientifiques plus riches, plus performants, plus constants, plus impliqués et plus stables ont connu une retraite avancée. On récupère la vieille qui fabrique des monstres à la place... Mais j'te remercie d'm'avoir laissé un dossier DreadPorn non-verrouillé. J'ai apprécié.


La plumeuse lâche un vague sourire. Son regard cerné n'est pas fixé sur le concierge, vu qu'elle vérifie le reste de ses affaires, mais c'est le plus proche d'une interaction émotionnelle qu'elle puisse offrir dans un contexte ordinaire.

-T'as aimé ? Ah bah tu sais, j'te l'ai compilé après avoir, euh, emprunté ton deck avant d'rentrer... T'vois, s'ça qui est bien avec moi, j'suis une connaisseuse en exotisme. S'pas Cryx qui t'aurait fait ça, s'pas, et pourtant l'en connaissait un rayon de c'que j'en sais. M'considère ça comme un remerciement d'pas avoir bousillé mon trench.


Le concierge grattouille sa tempe un peu dégarnie, pas si mécontent. Au fond, ils sont un peu pareils, des rebuts, puis la plupart des gens qui sortent, ils ne discutent pas avec lui, trop pressés de retrouver les personnes qu'ils aiment, et qui les attendent ou qui ont disparu. Trop pressés de vivre. Bien malgré lui, ça l'émeut, cette connerie de dossier pornographique à son nom.



-Alors tu rempiles... Jusqu'à la prochaine fois. J'me demande pourquoi tu fais ça, piaf. Tu finis toujours par revenir.

Nouveau haussement d'épaules indifférent. La vaut' est en train de vérifier l'état d'une impressionnante collection d'outils et de scalpels, qu'elle range à mesure dans une non moins impressionnante collection de poches, ce qui explique sans doute en partie la taille du manteau.

-S'doit être une forme de déterminisme psycho-génétique. J'sais rien faire d'autre que d'bricoler les objets et les gens, j'suis débrouillarde, et ça m'plaît. Ok, j'fatigue vite, mais... ça m'convient. Puis on m'oublie entre-temps, ça m'laisse l'champ libre. Faut que j'y aille, s'pas.

-Ouais. A bientôt j'présume. Prends soin de toi, la vieille.


Vague hochement de tête. Elle se dirige vers la porte sans plus de cérémonie, guère vaillante, mais peu soucieuse de ce genre de signaux corporels basiques. Le smog l'avale bientôt, le concierge fixe la porte quelques instants, puis ricane. Il n'est pas triste. Il a de quoi s'occuper sur son deck.



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Crédits :
Artistes : NicoSaba, Llaren, Johnny Goth

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