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De l'identité et de l'origine. (Non référencé)


De l'identité et de l'origine.

Qui suis-je ? C'est peut être la question que l'on se pose le plus rapidement et le plus facilement. Et les quelques mots crachés par la voix désincarnée qui nous dit que "la sortie c'est par là", ne répond pas tellement aux questions existentielles.
La réponse évidente, et peut être banale, serait de dire que nous sommes tous des enfants de Thallys, du centre de clonage, portant notre héritage issu des cents premiers fumiers à avoir foulé le sol de la ville.
Bouillie génétique, mélange quelconque. Prenez deux ou trois premiers nés, touillez lentement, ajoutez une poignée de sel, et laissez mijoter à feu doux. Démouler le clone lorsqu'il est prêt. Mais qu'est-ce que ces origines génétiques peuvent dire sur qui je suis ? Ma vie, ma personne, ne sont pourtant pas réellement différentes, si j'ai Neféria Imponite en ancêtre illustre, ou Alastor Hoblet, ou même Lance. Je n'ai au final qu'une combinaison parmi le million de possible, mais je n'ai ni leur personnalité, ni leurs qualités ou défauts. Je ne suis pas une grande architecte sous prétexte d'avoir hérité une ID ni une grande chanteuse pour en avoir hérité une seconde.
Cependant, on peut quand même se demander s'il n'existe pas une part de mémoire génétique en nous. Bien que nous ayons une éducation fournie un minima par le centre de clonage, comme par exemple le fait de savoir parler tous la même langue, il y a forcement une phase d'apprentissage par les techniciens du CdC. Cependant, cet apprentissage ne nous explique pas comment nous arrivons, de façon innée et naturelle, à comprendre et entrevoir les relations sociales, les liens entre les gens. Est-ce que c'est une part qui nous est fournie par notre héritage génétique ? Nous disposons cependant tous de ces capacités à un degré plus ou moins élevé, nous ressentons des émotions, nous avons de l'empathie, et il semblerait que ce soit plus un héritage racial que quelque chose qui nous provienne de ces personnes là directement.
Tout ce que j'ai de ces ID qui me sont accolées, c'est le poids de ces noms ; mais ce poids est lui même infime comparé au poids de l'Histoire. Avec le même bagage génétique, je ne serais pas la même personne si la ville n'était pas la même. Indubitablement, je suis le produit de l'Histoire, avec un grand H. Sans la mort d'Hujan, la destruction du secteur 5, la division de la ville en secteurs, le départ du Lâche dans son vaisseau, la Rébellion et Lance, je ne serais pas Rebelle, au même titre que nous tous. Je serais peut-être un rouage dans cet Empire dirigé par Hujan, beaucoup plus égalitaire, j'écrirais des articles sur les bienfaits de la politique socio-médicale et l'avantage que nous apporte l'existence d'un secteur entier dédié à la médecine psychiatrique. Ou bien la rébellion aurait très bien pu être détruite le premier jour en désactivant le centre de clonage du secteur Orion, et je serais alors une dissidente en secteur Marran, à distribuer des tractes sous le manteau, appelant la population à se révolter, et je participerais aux raids des forces dissidentes sur les centres de rééducations pour libérer mes amis emprisonnés. Ou alors j'aurais pu être de l'autre coté, endoctrinée tel une machine, à défendre des intérêts qui ne sont pas les miens, et le soir en rentrant chez moi, passer ma nuit à douter. Le domaine des possibles, si on change même de façon infime le cadre historique, devient infini et probablement imprévisible à cause même de cette infinité de facteurs incontrôlables.
L'Empire essaye de nous faire croire que l'Histoire est une succession d'actions réalisées par des individus providentiels. Cirius, Hujan, Alleria, Stillicon, et ainsi de suite, et pourtant, ces même individus ont été crées, tout comme moi, par la pression de leur environnement. Sans la présence d'une société tribale qui n'attend qu'à être réformée, Cirius et Hujan n'ont rien à construire, et disparaissent dans l'histoire comme les deux derniers survivants de l'Humanité. Mais sans eux, c'est peut être Lance qui aurait unifié les survivants pour construire Dreadcast. Sans un empire autoritaire, impossible alors pour une figure autoritaire d'en prendre la tête et le contrôle, et Alleria ne serait jamais montée au pouvoir. Mais de même, sans Alleria, la société étant telle qu'elle est, la place pour une figure autoritaire de remplacement existe, et si elle n'avait pas existé, un alter ego aurait pris sa place. Il est sous entendu que sans Lance, pas de Rébellion... Mais ne devrait t'on pas dire, sans Rébellion, pas de Lance pour l'incarner? Quelqu'un d'autre n'aurait t'il pas pu prendre sa place et en devenir le leader charismatique ?
Je ne peux me résigner à croire qu'une seule personne ait jamais possédé les attributs nécessaires pour prendre ce rôle. Je dirais même qu'au contraire, ce sont les rôles qui nous forment, et dans un monde alternatif sans Lance, alors des gens s'élèveraient pour dire que cette autre alternatif représente la Rébellion.
Mais au même titre que je suis un produit du vécu des autres, je suis tout autant le produit de ma propre expérience, de mon propre passé. La pluie, qui vient cogner sur cette fenêtre me rend mélancolique, me rappelant à mes souvenirs ; ces souvenirs, heureux ou douloureux, qui ont façonné d'autant plus ma personnalité : si je ne t'avais rencontrée, est-ce que je verrais le cafey de la même façon ? Ce trench offert qui couvre mes épaules et qui me protège du froid : voila que je porte la chape du vécu sur mes épaules, comme ce trench. Ce hasard du centre de clonage qui me fait arriver en Orion et non en Marran. Peut être que si la situation avait été inversée, j'écrirais à l'heure même pour le DCN, expliquant tout l'inverse aux Impériaux, qu'il est nécessaire de se soumettre car seul le providentiel Ambassadeur nous sauvera avec ses nobles et que la liberté n'est qu'une illusion. C'est ce qu'implique en réalité cette question, de savoir qui je suis : comment lutter contre le poids du passé, ne pas m'enfoncer sous mes expériences ? Comment avancer, ne pas sédimenter comme la poussière chargée de farin après la pluie ?
La solution est aussi la réponse à la question de qui je suis : pour me soustraire au passé, qu'il soit génétique, historique, ou personnel, je dois m'incarner dans le présent. Pour ma part, j'écris, je partage mes expériences personnelles, j'essaye de me projeter dans ce présent dont je ne fais pas parti, pour m'inscrire de façon plus forte et durable dans ce présent dans lequel je suis.

Nous sommes ce que nous faisons.

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Des mots et des idées.
13 Août 2020
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