EDC de Valion~36896
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Cacher
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Il devait être trois ou quatre heures du matin. L'ampoule vétuste accrochée au plafond diffusait sa lueur blafarde dans la chambre, illuminant les meubles d'une lumière maladive. Ils étaient tous à leur place, dans l'ordre des choses; en rentrant à gauche, ce terminal rétro dont je ne me servais quasiment jamais; au fond à droite, la commode dans laquelle traînait toujours les mêmes fringues, et à ses pieds, plusieurs bouquins que je n'avais pas encore eu le courage de lire. Puis dans le coin de gauche, la lampe de chevet qui ne marchait plus, et pour laquelle je n'avais toujours pas pensé à passer à la boutique spécialisée du coin. Et enfin, bien sûr, le lit double sur lequel je reposais, allongé sur le dos, droit comme un "I", immobile, à contempler le plafond...
...Et cette ampoule qui crépitait. Ça, ce n'était pas dans l'ordre des choses. Il faudra aussi que je la remplace. Mais, j'avais plus important pour maintenant. Cela faisait 40 heures que j'essayais de dormir. Seulement, je jugeais prioritaire d'analyser la situation que je venais de vivre; donc, je devais finir de comprendre ce qu'il s'était passé avant de me reposer. Je commençai alors à me visualiser, encore une fois, les évènements.
C'était une journée qui avait bien commencé, pourtant. Après les quelques heures de sommeil suivant mon travail nocturne sur l'anéantissement de cette IA, j'avais pris mon petit-déjeuner, je m'étais douché comme tous les jeudis et lundis de la semaine, et j'avais pris le chemin de la Tech, consultant brièvement l'AITL sur le chemin. S'en était ensuivi de longues heures à glander devant les machines, jusqu'à ce message d'Ayria. Je m'étais inquiété, j'avais attrapé mes affaires, puis j'étais sorti en toute hâte vers la serre Orion.
J'avais coupé à travers la magnificence verdoyante qu'offrait le lieu à ses visiteurs, pour me diriger vers une petite salle ressemblant à un laboratoire. Cette fois-ci, je devais le faire moi-même. C'est pour ça que je m'étais entaillé le bras avec un kanuf rouillé, et que je m'étais ainsi coupé plusieurs lambeaux de chair, avalés aussitôt par une machine. Dans un moment de faiblesse, j'avais lâché le kanuf, puis j'étais tombé à genoux, dans une petite flaque de sang. Mon sang. J'étais stressé, apeuré. La douleur me faisait pousser des grognements de douleur; je voyais trouble, je sentais mes cœurs battre plus fort pour compenser le choc hémorragique.
La machine avait alors émis un petit bruit pour faire savoir qu'elle avait terminé son ouvrage. Je m'étais relevé en serrant les dents, appuyé contre une table, puis j'avais saisi une poche en plastique, dans laquelle j'avais jeté le résultat du travail répugnant de ce monstre de fer. J'avais ensuite pauvrement bandé mon bras avec du matériel de premier secours, que je prenais la précaution d'emporter en permanence avec moi depuis quelque temps déjà.
J'avais ensuite remonté l'avenue jusqu'à son Nid, blanc comme un linge, spectre parmi les passants. J'étais rentré dans l'obscurité de sa villa, contrastant avec les néons aveuglants jonchant les rues de Dreadcast. Elle était recroquevillée, enchaînée au fond d'une prison macabre qu'elle s'était elle-même fabriquée. Couverte de sang, nue, son regard vide se projetait sur les murs marqués par d'innombrables traces de griffes. Des débris humains jonchaient le sol. Et surtout, elle était seule.
Sa fille adoptive l'avait abandonné à son sort après avoir essayé sans succès de la nourrir, mais cela, je ne l'avais compris que plus tard. Et après réflexion, qu'importe; elle est incapable de voir un mal autre que le sien, elle passe son temps à chercher toujours plus d'attention des autres, jamais satisfaite. Et quand elle ne peut détourner le regard du mal d'un autre, elle choisit la fuite. Pire que moi dans ce domaine. Peut-être se rendra-t-elle compte qu'elle est la seule à s'infliger toute cette souffrance, qu'il ne suffit pas d'attraper la main d'un autre, mais d'accepter cette aide pour se relever et marcher de soi-même, un pas après l'autre.
Les chaînes avaient cliqueté en réponse à la stupeur qui m'avais pris. Shaia s'était relevée, dévorée par sa faim, toute humanité réprimée; seul comptait à cet instant ce besoin inassouvi. J'avais sorti la poche ensanglantée de mon sac, plongé la main dedans pour y attraper la viande, avant de la jeter aux pieds de ma sœur. Elle avait fondu dessus, animale, pour l'empaler sur ses serres et la déchiqueter de ses crocs. Sa fureur prédatrice s'était calmée peu à peu, submergé par les larmes, de regret, ou de colère contre elle-même? Je ne saurai l'affirmer. Elle s'était recroquevillée en boule, et avait sombré dans une sorte de léthargie. J'en avais profité pour sortir chercher de l'aide.
J'avais erré dans le dédale de rues du secteur, d'indice en potentiel endroit où j'aurais pu peut-être retrouver Syllanh et Deina. La première avait cassé son communicateur, la seconde l'avait éteint; je n'étais armé que de mon deck et de mes bottes pour parvenir jusqu'à elles. Les gens regardaient passer ce qui n'était déjà plus que l'ombre de moi-même, parfois en souriant, parfois avec un soupir éprouvant quelque chose de semblable à de la pitié. J'avais montré leurs photos à des gens dans les bars pour me renseigner, tourné en rond, encore, et encore. Cela me permettait de ne pas avoir de temps pour éprouver quoi que ce soit envers le départ d'Ayria, contre la crise de Shaia. Je ne pouvais plus me le permettre si je voulais la sauver. Ainsi...plus je m'étais enfoncé dans les ruelles sombres parcourant la cité, plus je m'étais renfermé. A chaque minute, la nécessité de faire les choses rigoureusement avait pris un peu plus le pas sur mon inquiétude, ma peur, mon angoisse.
Finalement, j'avais eu la tête assez froide pour trianguler le communicateur de Deina, et je l'avais retrouvée à l'entrée de la cage du corbeau, alors qu'elle essayait de la réconforter. J'étais resté derrière, incapable de continuer à éprouver de l'empathie. Puis j'avais appris l'une des causes du craquage nerveux des filles. Et j'avais été incapable d'éprouver de la haine envers celle-ci. Et lorsque Urania est venue prendre des nouvelles, j'avais été incapable d'ébaucher un sourire rassurant.
Il m'avait fallu ces jours d'insomnie pour comprendre que j'avais pris sa place, enfermé dans une cage.
Retour au point de départ. Je suis toujours allongé, dans la même posture. Elle n'est pas confortable, mais elle n'est pas inconfortable. Ce n'est pas ma préoccupation principale. Je dois avant tout remettre les choses en ordre. Résoudre le problème. Commencer par le comprendre. Quelque chose m'échappe.
Il devait être quatre ou cinq heures du matin. Je commençai à me visualiser, encore une fois, les évènements.
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Informations sur l'article
Le Passé. (DarKobalt/MockingJay)
15 Mai 2016
1165√
6☆
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Personnages cités
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Syllanh (217☆)
Toubib Delta
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◊ Commentaires
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Valion~36896 (366☆) Le 15 Mai 2016
La mise en forme étant un essai, merci de me signaler si ça rend mal chez vous. -
Lincoln~62170 (48☆) Le 17 Mai 2016
Wow. Ca prend bien aux tripes avec le son. Et nan, la mise en page est cool je trouve.