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Les utopistes.

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« Pourquoi de telles pensées obscures mon enfant ? »
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J'ai beau aimer mon secteur, les ambiances de ses petits quartiers et les odeurs qui s'échappent silencieusement des restaurants sous les cris des cuisiniers ne suffisent jamais à me faire oublier. Rien n'efface de ma mémoire la pauvreté ambiante et visible sous mes yeux quand mes pieds arpentent longuement les rues et les avenues de ce secteur 3.
Il y a fort longtemps, dans des temps anciens que les plus jeunes ne cherchent même plus à connaître ou à comprendre, quelques-uns sont venus coloniser ces lieux, usés et désabusés, en provenance d'un secteur 1 tyrannique et monarchique.
Petit à petit, pierre par pierre tout ou presque fut reconstruit au prix d'efforts harassants.
Mais que reste-t-il aujourd'hui de ces précurseurs et du dur labeur ?
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À vrai dire, leur héritage c'est réduit comme peau de chagrin sous la chaleur qui sert à liquéfier les matériaux de nos crédits puce. Les âmes noircies par les résidus volatils de plastique en fusion nous font désormais croire qu'ils agissent pour le bien commun.
Je doute que quoi que ce soit de réellement positif ait pu perdurer sur le long terme grâce à l'argent, au pèze, à l'oseille ou quelqu'autre nom que l'on donne à ce poison.
Si je devais émettre une hypothèse, je dirais que tout a du foutre le camp lorsque l'on a commencé à bourrer le crâne de nos jeunes éveillés avec des idées de violents combats et de médailles du mérite offertes en échange. La faute à ces groupuscules nauséabonds dont la psyché est aussi vide que les yeux d'un drogué après son troisième shoot d'une de ces saloperies que nous consommons pour oublier les affres d'une vie morne et cernée par la pauvreté.
J'aime marcher dans les rues de mon secteur, mais sans réellement apprécier les déchets que j'enjambe à tour de pieds relevés, le tout dans une chorégraphie désynchronisée avec les autres danseurs de ce piètre spectacle que nous offrons à nos futures générations. Et les jours où le cœur se fait lourd, j'aime penser à ce que nous serions si enfin le bien commun revêtait de nouveau un autre costume.
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La pauvreté, soit l'aridité des esprits, la disette qui tiraille les entrailles, la sécheresse des cœurs qui consomment des corps pour de la baise, la médiocrité des actes, la platitude des quelques conversations et la détresse généralisée en phase terminale.
Il serait si simple de dépeindre un tableau idyllique d'une Rébellion en oubliant de pointer du doigt les constats de vies faméliques et sans but.
L'idée d'inventer des mensonges nous semble parfois plus engageante que le lourd poids de la vérité sur nos épaules bien frêles au final.
Depuis que je suis éveillé, j'ai pu observer la capacité qu'ont les individus à se faire du mal, comme s'ils adoraient cela sans réellement le comprendre. Ils ne saisissent pas tous, au fond, qu'en entrant dans la danse, ils espèrent sentir les quelques bribes de vie qu'ils possèdent encore en eux. Ils sondent le gouffre complexe que leur corps englobe pour voir si tout n'est pas encore totalement mort dans le marasme ambiant qui nous cerne.
Parfois j'ai la sensation qu'ils se demandent s'ils arrivent encore à éprouver des sentiments qui ne soient pas factices ou façonnés par toutes les sordidités qui nous entourent, aussi diverses soient-elles.
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Les poètes ou les esthètes des mots vont et viennent à travers les âges sans nom, délivrant à ceux qui veulent bien entendre, de cruelles et véritables paroles.
Pire que la tristesse, c'est d'accepter de vivre à ses côtés qui est un signe bien plus grave du déclin que l'humanité est en train de vivre. La fleur au fusil, elle se dirige toute pimpante sur ses deux jambes vers les abysses créés par ses propres excavations.
Quand mes yeux se ferment, j'imagine un monde coloré où le bleu ne jure plus avec le vermeille de mon palpitant.
Ce violet que j'ai pu apercevoir par le passé serait-il la clef du bonheur que chaque souffle de vie recherche désespérément ?
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Faites une place pour mon corps, disparu ou entier. Ce trou sera mon monument, un phare pour quand je serai parti. Et le jour où ce moment viendra, je peux affirmer que j'aurais tout fait avec amour. Ce ne sont pas les journées emplies d'agonie cérébrale qui feront que mes pas délaissent les chemins vertueux au profit des rues pavées de bonnes intentions.
Il faut bien comprendre toute la tristesse de ce monde si l'on veut découvrir l'antidote des maux et des blessures.
Païen, je suis né, croyant en diverses choses et faits qui composent tant bien que mal le puzzle de notre monde en perpétuelle évolution. J'y trouve la force de croire que certaines petites réalités de ce monde permettent d’insuffler dans le cœur de l'humanité la dose d'espoir qui l'empêche de passer de l'autre côté.
Je me surprends encore à rêver que chaque petit caillou, chaque baiser, chaque plante, chaque sourire, chaque respiration, chaque caresse, est un dieu qui s'ignore pour mieux nous aider à gravir les perpétuelles marches de nos chemins de croix.
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J'ai beau aimer mon secteur, je préfère voir les sourires couronner le visage de ceux qui n'ont presque rien. Parfois quand je me balade, les odeurs vont et viennent subtilement dans mes narines. Alors je m'arrête, un verre de Skiwi éventé sous mon nez, observant avec attention la pièce de théâtre qui se déroule sous mes yeux. À ma droite se tient l'échoppe brinquebalante d'un gobelin tactile et habile. Non loin de lui et droit devant moi une porte d'entrée donnant accès à un vieux cinéma, tenace et fidèle défenseur de l'art.
Alors qu'une tête connue passe à ma gauche, j'offre un sourire accompagné de salutations.
C'est à ce moment que je sens une main se poser sur mon épaule, je me retourne pour mieux apercevoir son sourire et ses cheveux illuminés par les néons. Devant moi, une assiette contenant quelques brochettes appétissantes dont l'odeur n'arrive pourtant pas à couvrir celui de son parfum. Je souris brièvement au cuisinier en guise de remerciement, cherchant ensuite cette main féminine pour l'auréoler d'un doux baiser avant de faire honneur à la viande d'écureuil fraîchement cuisiné.
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« Les choses se guérissent toujours tout au fond de moi, elle n'a pas à parler, je la ressens.
Nous vivons en haut d'une montagne et au pieds de celle-ci, les terres s'étendent à perte de vue.
Du haut de la falaise, je jette toutes ces petites choses et j'écoute le bruit qu'elles font en tombant.
Je les regarde chuter jusqu'à ne plus apercevoir que son sourire, rassuré. »

Informations sur l'article

Fault and Fracture.
03 Avril 2018
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◊ Commentaires

  • Flÿnn (806☆) Le 03 Avril 2018
    « J’aime l’humanité, mais, à ma grande surprise, plus j’aime l’humanité en général, moins j’aime les gens en particulier, comme individus. »
    Il aura trouvé le remède, lui, contrairement au frangin.
  • Trïll (158☆) Le 05 Avril 2018
    Et merci Sasha, c'est touchant de lire ça.

    A quand j'aurais du temps !

    @Flÿnn Ils sont complémentaires, je dirais.
  • Akili~68612 (90☆) Le 06 Avril 2018
    *l'emmène baisey IG*

    Un bouquin, on a dit :( C'est trop court ça !
  • Trïll (158☆) Le 09 Avril 2018
    smiley