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Flouf Flouf
L'effondrement, le grand Effondrement grandiloquent, quand je regarde par la fenêtre du four un gâteau qui fait Flouf au lieu de faire lentement wooof.
Des réactions chimiques, un peu de thermodynamique, ou peut-être simplement un dosage raté, quelque chose de très prosaïque, stupide même. J'ai oublié de mettre assez de farine. Donc ça fait flouf , ça se renfonce, ça se déploie pas. Ou pas bien.
Haine, colère, aigreur, tristesse, frustration, et désespoir bien sûr. Le seul qui accueille à bras ouverts, celui qui écoute, immuable, le grand Flouf lui-même. Le Flouf de tous les Flouf . Qui répète à l'envie qu'il nous l'avait bien dit, alors même qu'il est silencieux, qu'il l'a toujours été. Sa présence suffit.
Des essais, il faut bien avancer, au bout du bout du bout. Comment dire. Pendant un temps, on se fabrique un genre de plan B nihiliste. Ce n'est pas grave, on s'en fiche, rien n'a de sens. Comment pourrait-il en être autrement ? Regardes autour de toi deux minutes. Même sans prêter attention, ça te sautera au visage. Même si tu dors, même si tu es dans le coma, anesthésié, plongé dans l'oubli, tu flottes dedans. Des clapotements lents et répétitifs, à peine perceptibles pendant que tu dérives, te rongent lentement. Ils attaquent la chair, mais ce n'est pas leur cible. Ils y passent juste, parce qu'elle est là. Ils attaquent surtout le reste. Ce qui n'est pas palpable, des souvenirs peut-être, des idées aussi, des rêves putain. Et lentement ils prennent l'eau. On écope, mais c'est abrasif, toxique, on en fout un peu partout, mais on écope quand même. Un peu.
C'est à dire qu'au début, on peut bien se dire "hey, bon, je coule, je vais couler, sombrer, floufer, rien à foutre" . Le rien à foutre me rassure. Il m'empêche de trop me compromettre, de trop renier l'amas chaotique de poutres, brindilles, échafaudages qui me tient encore un peu debout. Un genre de zombie ? Ouh la la carrément quoi, un zombie, un truc vide avec des idées mortes dedans. Fossilisées, remplies de cire, conservées pour études. Dévitalisées. Empaillées. Même pas exposées.
Toujours est-il qu'il y a un temps ou le rien à foutre se concrétise. Vraiment rien à foutre ? Chiche ?
Bah non. Au fond du fond, pas tout à fait rien à foutre.
Il faut alors regarder la structure qu'on écope et commencer à se dire que le plan B, le rien à foutre, n'en est pas un. L'effroi, alors, arrive. Poisseux, glacé, d'une blancheur noire, si noire, si sale. On écope avec de vifs mouvements, avec panique, on constate à quel point la structure est délabrée, à quel point elle n'a jamais été "pas délabrée" . Tout craque et grince, et la respiration est hachée. Le souffle est court, le regard est vitreux, les yeux sont mouillés, le cœur serré. La cervelle chauffe, suinte, la matière noire, massive, déforme tout. Emplit tout. Effondre tout.
Tout ressort, tout se mélange, un être nouveau naît de son propre effondrement, de son propre pourrissement, regardez-le s'agiter ! Voyez-le s'écoper lui-même, il se jette par-dessus bord ! C'est comique, prenez des photos, ça n'arrive pas souvent et ça vous fera des souvenirs ! L'instinct de survie l'agite comme un danseur à air, tant de mouvements pour rester sur place! Flouf Flouf Flouf Flouf.
C'est le son. Flouf Flouf -à droite- Flouf Flouf -à gauche- Flouf Flouf Flouf -zigzag sur lui-même - Flouf Flouf -tordu dans tous les sens-
Le son d'une angoisse existentielle ? Du vide, de l'effroi poisseux, que sais-je. Flouf. Même ça c'est décevant. Pas de majestueux ka-boom, pas de déflagration chatoyante, de flammes dévorantes. Flouf Flouf Flouf. Les yeux écarquillés, bordel j'en rigole presque on dirait qu'il va hurler une sorte de désir de vivre pas très conscient, qu'il semble découvrir, moi aussi je veux en être ! Être heureux, vautré dans la joie, marre d'écoper en fait, pas envie de couler en fait, j'y avais pas pensé en fait ! Mince je coule en fait.
Bon voilà, y'a ça et donc la transcription de ça avec des lettres blabla mots trucs. Et ça ressemble à rien, évidemment, évidemment (comme une comptine). On peut toujours exhiber les fossiles. Les machins empaillés. Y'a plus que ça dedans, et plus l'érosion avance, moins ça n'a de sens. Certains mots lancent des insultes, crachent, se cachent, refusent d'être associés d'une quelconque manière à ce projet. C'est pas dans leur contrat. C'est pas des psychologues. Ils ont autre chose à foutre. C'est laid ! Ils crient. C'est absurde ! Ils chouinent. Mets nous ailleurs ! Laisse-nous tranquilles ! On a rien demandé ! Et par pitié, reste seul avec tes floufs plotches chmoup boink uiikk là, tartine des pages de ces machins sans nous.
On écope, on écope.
Flouf Flouf Flouf Flouf Flouf
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Informations sur l'article
Mélodies éventrées
11 Juin 2023
268√
8☆
2◊
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◊ Commentaires
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Stiny~49460 (386☆) Le 11 Juin 2023
Ca flouffe fortement, celui-là. Quand je discute avec ma psy de ce type de ressenti, je parle du goudron. C'est noir. Ca colle. Quand tu touches d'autres choses tu en fous partout. Je crois que le goudron et le flouf sont sans doute cousins. -
Tramme (21☆) Le 11 Juin 2023
Oui clairement de ce que tu décris, des cousins proches