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Renaissance

Comme il est étrange ce sentiment d’éternité bafouée. Comme il est décevant, ce sentiment d’inachevé alors que le corps n’est plus qu’un amalgame d’organe, de muscle, d’os et de chair laissé pour compte au détour d’un terrain vague. L’esprit qui se veut libre ose croire en la multitude de possibilités qu’offrirait le repos du guerrier. Le temps de reprendre son souffle, le temps d’une pause hors d’une autre vie préprogrammée.
Le libre penseur enfermé dans une prison qu’il ne peut pas voir, le condamné qui nie la futilité de son existence et continue à croire au semblant de libre-arbitre précaire que lui offre la reprogrammation de ses souvenirs. À mémoire contrôlée, l’on oublie plus facilement le traumatisme du passage de l’état de mort artificielle à celui de renaissance illimitée.
C’est un lourd sommeil sans rêve, vide. Il n’est ni reposant ni agréable. C’est une interminable attente, suspendue dans un court laps de temps pourtant. Le nouveau corps mature dans une enveloppe visqueuse, faible et dépourvu. Un corps en tout point similaire au précédent, intact, encore brut. La première prise de conscience est douloureuse. Le corps s’éveille, les poumons cherche l’air mais ne rencontre que le goût âcre de la noyade.
Paniqué, le nouveau clone ouvre ses yeux fragiles, blessés par la lumière crue. La peur est la première chose que nous ressentons et dans notre soudaine agitation, la pression monte dans le réceptacle. La cuve vomi son fiel aqueux et recrache le parasite que nous sommes. Le premier contact avec le sol est froid, rassurant.
Avec la première respiration viennes les étourdissements et la nausée. L’engourdissement général témoigne du sang qui se remet à circuler dans les membres, le cœur pompe fort et vite, tant et si bien qu’il donne l’impression de remonter dans la gorge. Vomir est notre premier réflexe de survie, qu’il serait pathétique d’expérimenté une nouvelle mort, étouffé dans sa propre bile. Nous voudrions nous levez, mais nos jambes ne répondent pas, pas encore. C’est comme se retrouver dans le corps d’un nouveau né. L’on réapprend à marcher, à parler, à penser. Lentement, nous nous approprions ce nouveau corps.
Ni vraiment vivant, ni vraiment mort nous poussons à nouveau la porte vers le dehors…

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Latence lucide
22 Avril 2015
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