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Ce n'est pas raisonnable

C'est le combientième, celui-là ?
La brune a perdu le fil, la seule chose dont elle est certaine, c'est qu'elle a plus que mérité une pause. Elle quitte la chambre de sa dernière victime, s'éloignant du lit dont les draps sont encore imbibés du sang du malheureux pour rejoindre la pièce principale de l'appartement. Elle fouille les meubles, amusée, et y trouve une boîte de cigare qu'elle s'empresse d'ouvrir afin d'en sortir un et de le porter à sa bouche. Après avoir ouvert quelques tiroirs supplémentaires avec un agacement qui se fait sentir, elle trouve enfin le précieux objets qu'il lui manque : un briquet. Après plusieurs tentatives, une flammèche finit par s'échapper de l'objet, apportant enfin un peu de lumière dans l'appartement plongé dans une obscurité quasi-totale. Une fois son cigare allumé, l'humaine se laisse tomber sur le canapé en face d'une fenêtre donnant sur le reste de la ville.
Tu sais, ça sert à rien de te la jouer en faisant semblant de philosopher devant la fenêtre. Tu trompes personne. Et, en plus, personne ne te vois.

Son temps est trop précieux pour qu'elle le perde à se justifier. Elle demeure avachie sur le canapé, laissant s'échapper un fin filet de fumée d'entre ses lèvres. Le silence est pesant. Pas seulement le silence d'ailleurs, tout l'est ici, l'air, l'atmosphère, l'ambiance lugubre, les immenses bâtiments en face d'elle. Elle aurait presque la sensation de n'être rien face à la puissance que dégage ce secteur et son système.
De la puissance, vraiment ?... C'est ça que ça t'inspire ? Ca fait pitié, oui !
Peut-être oui... La même pitié qu'elle a ressenti lors des affrontements face à ce qui devait être l'élite de l'armée impérialiste. Une fascination pour les personnes, leurs auras, et de la peine en les voyant tomber malgré leurs efforts. Finalement, peut-être étaient-ils à l'image de leur secteur, des puissances sur le déclin, sans retour en arrière possible. La brune tire une dernière fois sur le cigare avant de le lâcher, à moitié consumé. Elle se relève de son canapé, ou du moins, du canapé qu'elle a emprunté, et piétine le cigare mollement.
On repart déjà ? Tu devais te reposer. Mais bon, t'es une connasse, tu veux juste buter encore un zimp. Ca t'apporte quoi, hein ? Ils sont immortels. C'est comme essayer de remplir un tonneau troué.
La rebelle le sait. Mais peu importe. La voix cynique qui tente de se mêler de ce qui ne la regarde pas ne comprend pas toute l'importance de la chose. C'était ça son problème, elle réfléchit trop, même en terrain hostile. Son hôtesse n'a pas ce problème là, son objectif est clair : elle remplira le tonneau, percé ou pas. Elle fournira tellement d'effort pour le remplir, sans cesse, sans arrêt, sans défaillir, qu'elle aura le dernier mot. La force mécanique de son corps sera suffisante et il est hors de question de laisser la raison interférer et la limiter dans sa tâche.
T'es vraiment en train d'essayer de te convaincre que ça peut marcher ?... Ce n'est pas raisonnable.
Elle n'essaie pas. Elle est convaincue. Sybil, souffle un rire, exaspérée par le manque d'ambition de la voix. Et puis, elle n'avait pas à l'écouter : ici, seule la force et la violence compte, la raison n'a pas intervenir. Qu'elle se taise. La jeune humaine saisit un livre dans une des bibliothèques de l'appartement et l'enfile dans son sac à dos, qu'elle balance sur son épaule. La brune saisit ensuite la capuche de son sweat pour la renvoyer sur ses cheveux, rouvre la porte d'entrée de l'appartement, sort et dessine, à l'aide de son kanuf, 3 lettres à côté de l'entrée, "T.A.P." : "impérialiste Trouvé et Abattu, appartement Pillé".

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Paroles Sibyllines
07 Mai 2021
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