EDC de Stiny~49460

AAAAAaaAAAaaarrrrh!





Dans un cri suraigu, que même le masque à gaz ne parvient pas à couvrir suffisamment pour éviter qu'il ne détruise les tympans les plus proches, la petite tourbillonne, seule au milieu du terrain vague. Et son hurlement, lancinant, couvre avec peine le vacarme pétaradant de la tronçolame qui tourne au bout de ses bras maigrelets.


Ecorcheuse la tronçonneuse et son humaine animale dansent un étrange ballet, une valse d'insouciance qui fait fuir les fouilleurs et décapite les canettes. La scarifiée en peau de rat ne s'intéresse ni à sa direction, ni aux dommages collatéraux, et nulle peur ne la hante. Après tout, qu'aurait-elle à craindre ? Elle est la fille du Grand Rat et de Danzel, deux pères aussi abandonniques qu'invincibles, et à ce titre, elle ne peut que l'être elle-même. Et si c'était ça, le bonheur à Dreadcast ?


Et qui oserait le lui contester, d'ailleurs ? Là où la plupart ne croient pas, et où ceux qui croient encore doutent, la fille rat balance malédictions, sorts, escarres et coups. Et que le Grand Rat reconnaisse les siens ! Son corps est un autel, une outre à maladies et à cicatrices fraîches, et aux odeurs musquées de remugles et de sexe, et d'affections arrachées entre deux murs crevassés.


Il n'y a pas de poutre dans son oeil, ni de paille dans celui du voisin, il n'y a que des yeux crevés de part et d'autre, mais elle s'en fout, elle a ses hublots, et elle rit, de ce rire fou et rauque, ce 'hrrrhrrrr' de moteur encrassé, de pure joie, de ce rire ni délicat, ni féminin, mais débordant d'une joie de vivre qu'on croyait inexistante dans la Ville actuelle.


Ses jambes velues et saignantes s'agitent sur les déchets éventrés, et que pourraient-ils y redire, ces partenaires de jeux involontaires, tandis que le couple enlacé de l'Ecorcheuse et de la Fille Rat les transperce de sa danse sensuelle toute de miel et de dents qui déchirent. Les prédateurs fuient. Ils l'ont déjà bouffée, une fois, deux fois, et elle en redemande, et elle griffe, et elle hurle de joie et sent de plus en plus comme eux, alors, ils ont renoncé, l'effort n'en valait pas la chandelle, la petite couverte de plaies en est une elle-même.


Mais rien n'est vraiment éternel, n'est-ce pas ? Rien ne l'est. La tronçolame pétarade une dernière fois, s'éteint, et la petite la relâche, la laissant partir à l'aveuglette. Elle sait lâcher prise quand les coeurs ne grognent plus ; les proies réapparaissent toujours, et les escarmouches, et le sang et l'amour. Elle ne réfléchit pas plus loin, elle sait qu'ils sont là, qu'elle n'a pas à s'agripper, qu'il lui suffit de frotter le museau ou de chercher pour que tout lui revienne. Et si c'était ça, le bonheur à Dreadcast ? Et si c'est cela, pourquoi l'a-t-elle lâché ?...