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« Ombres fractées »

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Ombres Fractées
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L'aube blafarde se déversait sur les toits poisseux du secteur Marran, serpent de béton lové dans les plis fatigués du monde.

Je suis née là, parmi les ferrailles grinçantes et les ombres bavardes. Mon visage, dissimulé sous un masque de fortune, n'avait jamais connu d'autre reflet que celui, fissuré, des flaques stagnantes. Je n'étais qu'une énigme aux yeux fuyants des autres, enfant trouvée, sans nom ni passé. Ils m'ont accueillie à leur manière, dans le ventre sombre de la ville. Des mains calleuses m'ont poussée sur des chemins trop étroits, entre promesses chuchotées et menaces tranchantes.

L'ignorance me collait à la peau, poix froide et tenace. Perdue dans ma propre carcasse, j'avais confié mon identité à d'autres. Des sondages mécaniques, crachés par des machines usées, avaient sculpté ce que j'étais aux yeux du monde : sereine, tolérante, aimante. Des mots choisis, pesés, écrits sur du papier jauni. Des chaînes dorées.

Dix ans passèrent. Le temps, râpeux, creusait des sillons dans mon cœur. J'apprenais à survivre, à manier la lame comme on manie le pardon : avec prudence, sans jamais regarder en arrière. La violence devenait une langue que je comprenais. La peur s'ancrait dans mes côtes, mais je n'avais jamais osé me demander si elle était mienne ou celle des autres.
Puis il y eut ce murmure dans mon esprit, un souffle rebelle, venimeux. Il siffla des promesses de cieux plus vastes, de liberté au-delà des murs de mes origines. Le doute s'insinua, lent poison. Abandonner celles qui étaient mes sœurs. Quitter l'unique brasier qui réchauffait ma poitrine. Détourner le regard de celle qui avait fait de moi une lame vive. Renier l'âme mécanique qui battait d'une étrange humanité.
Le Smog devait être plus frais au-delà des murs.

Mais il n'y avait que des terres mortes et des vents brûlants. Chaque pas m'éloignait davantage de ce que j'avais été. Là-bas, personne ne chuchotait mon nom. Là-bas, je n'étais qu'une ombre de plus, errant parmi les ruines. La solitude me mordait, mais c'était un venin doux, presque réconfortant. Mieux valait s'éteindre loin que pourrir sous le regard des autres.

Les années ont glissé comme des lames sur ma chair. Le sommeil m'a appelée. La cryogénisation... une mort sans fin, une parenthèse glacée où l'esprit se fige, mais ne s'oublie jamais. Je croyais fuir le poids du temps. Je n'ai fait que le rendre plus lourd.
Quand mes yeux se sont ouverts, le monde avait changé... mais pas moi. Je suis revenue, mais ce qui était autrefois ma famille n'avait gardé de moi qu'une ombre. Lui était là, survivant au cœur intact. Il m'a accueillie comme on accueille les fantômes, avec une tendresse voilée de douleur. Mais les autres... leurs regards ne portaient que la rancune figée par le temps. L'ombre d'une trahison ne s'évapore pas.

Je marche à nouveau dans les ruelles suintantes du Sud, mes pas lourds d'une mémoire qui ne m'appartient plus vraiment. Les murs ne se sont jamais ouverts. L'air, partout, a la même âpreté. Seule la culpabilité est restée fraîche.

Chaque nuit, leur silence me rend mes fautes. Les rires d'antan se sont mués en murmures acides, les visages en statues froides. Le temps n'a rien effacé, juste figé l'amertume. Je cherche la rédemption dans des gestes discrets, une parole échappée, une lame rangée trop tôt. Mais les cicatrices invisibles marquent plus que le sang versé.

Lui, veilleur inflexible, gardien du souvenir que j'ai piétiné, m'aime encore — peut-être malgré lui, peut-être par nostalgie. Son regard me rattache à ce que j'étais. Pourtant, je sens la distance dans sa tendresse. Une faille ténue, assez large pour laisser filtrer les fantômes entre nous.

Les ombres m'observent. Chaque pas est pesé, chaque souffle mesuré. La tolérance, autrefois chantée par les machines, s'effrite dans les regards froids. La sérénité s'efface sous la carapace de la honte. L'amitié s'enlise dans la méfiance.

Je les vois, ceux qui m'ont aimée, tenter d'apprendre à vivre sans moi, comme je l'ai fait sans eux. Peut-être qu'ils ne savent pas que je les regarde s'éloigner. Peut-être qu'ils sentent encore mon ombre rôder derrière leurs pas, sans jamais oser se retourner. Il n'y a pas d'adieu crié, juste des silences étouffés, des absences qui s'étirent.
Ils avancent. Moi, je reste. C'est là ma punition. Être témoin de ce que j'ai brisé sans jamais pouvoir le recoller. La rédemption n'est pas dans l'attente, mais dans l'acceptation de rester figée pendant que les autres apprennent à oublier.

Alors, au creux de la nuit, seule face à mon propre reflet brisé, je murmure à l'obscurité cette question qui me hante plus que le pardon des autres :
Suis-je encore digne des mots qu'on m'a donnés... ou ne suis-je plus qu'une ombre parmi les ombres, à jamais prisonnière de ceux que j'ai laissés partir ?
Spoiler (Afficher)
Note HRP
Merci à tous ceux qui ont participé à l'évolution de mon personnage, que ce soit avant cette longue pause de plusieurs années ou maintenant. Dédicaces spéciales à:

Visa qui forge Silly depuis ses premiers pas et qui a accepté de continuer cette histoire malgré ses erreurs passées.
Akasha, l'une des plus belles découvertes d'après-pause, qui me redonne envie de créer autour de l'univers de Dreadcast et qui est un petit bonbon à elle seule.
Edredine, d'être un soleil qui me fait rire constamment.
Zoran et Riley, pour faire fonctionner mon cerveau et réactiver le peu de matière grise qui y est présente.

BB_24, malgré tout, que je chéris profondément, autant que mon personnage. Tu es la compagne de vie qu'on rêve tous d'avoir.
Shaia, que je peux oublier et que je couvre d'amour.
Nasty, dont je languis le retour.
Azra, pour tout son apprentissage et ces rires face aux fails.
Anarki, d'être là depuis le début et de n'avoir jamais changé.

Merci à vous tous et toutes pour ces scènes depuis 2019. Et au plaisir de pouvoir jouer encore avec vous et de rencontrer de nouvelles personnes.

Bisous sur la fesse droite,
JD Silly / Tex / Mnémosyne

Informations sur l'article

Il était une fois...
03 Mars 2025
247√  22 6

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◊ Commentaires

  • Zoran (85☆) Le 03 Mars 2025
    Magnifique ! Et avec plaisir !! smiley
  • Visa (324☆) Le 03 Mars 2025
    Tu es douée !
    Très bel article.
  • Akasha (0☆) Le 03 Mars 2025
    [Parmi mes plus belles rencontres et un honneur de te côtoyer. Rp de qualitay.
    Respect Jd. 🩵
    💫 très belle plume ]
  • Riley (0☆) Le 03 Mars 2025
    [Oh. Citation aussi surprenante qu'appréciée.
    Je tairai le sentiment qu'évoque Silly pour le moment, quoiqu'il soit positif !, mais je salue ton écriture et ta sensibilité.

    Merci et bon jeu !]
  • Mélinée (202☆) Le 09 Mars 2025
    Joli!
  • Mélinée (202☆) Le 09 Mars 2025
    On dirait une fine broderie de mots !
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