EDC de Shaia~37051
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Wastelands
Wastelands
La lande s’étend à perte de vue, animée de quelques collines, de bosquets, ainsi que de vastes clairières. Cependant tout cela est mort, sans vie, battu par le vent glacial, charriant les cendres qui tapissent le sol tout autour de moi. Les arbres défient de leur frêle structure brûlée le smog qui recouvre le ciel gris jadis si coloré, tout est mort, immobile, bloqué dans un éternel hiver noir.
« C’est donc là que tu passes la moitié de ton temps ? M’étonne pas que tu sois pas remontée de ton gouffre… »
« -Moi je l’aime ce coin de notre esprit chère Shaia, il convient à mon désir de solitude. »
C’est donc cela les limbes ? Non… Je ne suis pas morte, je suis juste dans son royaume à elle, dans les méandres de son esprit qui est aussi le mien. Enfin, une partie. Je choisis alors de me mouvoir, laissant une trace dans cette épaisse couche de cendres. Le souffle continuel de ce vent m’amène à frissonner, je ne sais pas où elle est, mais je la sens proche, jouant à son jeu favori, trouves-moi si tu peux. J’entre dans une clairière entourée de carcasses noires d’arbres.
« -Allez, cesse de jouer à ça, montres-toi ! »
Elle sort alors, me fixant de ses yeux gris, sans vie, aspirant toute joie, toute envie, s’en nourrissant. Faucheuse est mon parfait reflet dans un miroir, excepté ces yeux… Son sourire narquois me nargue, son regard me traverse de part en part, comme si l’on vous plantait une stalactite en plein cœur. C’était donc cela que j’étais avant la cuve ? Une solitaire, avide de souffrances, de sang et de silence ?
« -T’as donc décidé de t’aventurer sur mon terrain ? Enfin… »
« -T’as donc décidé de t’aventurer sur mon terrain ? Enfin… »
« -Je dois comprendre, qui tu es, ce qui t’as menée à cela. Et qui nous sommes. »
« -Nous ne sommes qu’une seule et même personne Shaia, juste deux facettes opposées, mais se complétant au final, j’aime la violence que tu repousse, le sang que tu hais voir couler, et la souffrance que tu veux à tout prix effacer. »
Elle me tourne autour, et je fais de même. Une longue et lente danse commence, nos regards s’affrontant, je n’ai plus peur, je veux la connaître, et la ramener hors de ces limbes. Elle veut me dominer, me contrôler à sa guise. Je ne la laisserai pas faire.
« -Ils te l’ont dit, la seule solution c’est que l’on cohabite, sinon celle qui sera dominée rongera l’autre peu à peu… et ce sera sans fin. »
« -Il me suffirait de t’annihiler, de t’écraser, ainsi tu ne deviendrais qu’une poussière parmi toute cette cendre ... »
« -Il me suffirait de t’annihiler, de t’écraser, ainsi tu ne deviendrais qu’une poussière parmi toute cette cendre ... »
« -Pourquoi les haïr, pourquoi LE haïr, le frapper, alors que tu le vois comme un frère. »
Elle me fixe, une haine indescriptible emplissant son regard
« -Tu le sais, ils sont tous partis, du jour au lendemain, disparus, sans rien dire, sans rien laisser. »
« -Tu n’es et ne sera jamais la seule dans ce cas, cela arrive à tout le monde ici bas, c’est notre lot à tous, notre malédiction face à l’impossibilité de mourir sans détruire notre puce… »
Nos échanges nous ont rapprochées, nous ne sommes qu’à quelques centimètres l’une de l’autre, je sens son souffle glacé sur ma nuque tandis qu’elle me tourne autour, sa présence est emplit de haine, de pensées plus noires les unes que les autres. Un flash m’aveugle, déchirant l’horizon à travers les branches noircies, une violente secousse vient me projeter en arrière, les arbres s’embrassent, la cendres s’envole en un nuage compacte, alors que sa silhouette s’efface dans le halo de lumière, se désagrégeant peu à peu. Et puis, le noir complet, accompagné d’un silence assourdissant
J’ouvre les yeux, pensant être aveugle, mais un plafond de béton me fait face, je me redresse et observe autour de moi, je ne vois que des murs noirs, sur lesquels me contemplent des yeux, chaque paire m’est familière, mais les voix viennent m’assaillir, me torturant, j’ai alors l’impression que ma boîte crânienne va exploser.
« Poison.. »
« -Danger »
« Tueuse »
« Déchet »
« Seule »
« Meurs »
« -Danger »
« Tueuse »
« Déchet »
« Seule »
« Meurs »
« Pars, loin, ne reviens jamais »
Elles m’insultent, me crachent leur haine, tandis que leurs yeux me bombardent de leur regards haineux, méprisants. Je me plie au sol, criant, pleurant pour que cela s’arrête alors que mon esprit est secoué de parts en parts, se déchirant. Les heures passent, l’une après l’autre, lentement, leurs voix continuent de me torturer sans cesse. Je ne sais pas combien d’heures, combien d’insultes, mais je connais leurs voix, je les entends chaque jours. Peu à peu je ne les entends plus, immunisée, je fixe ces yeux qui me jaugent, parmi celles-ci je vois ses yeux qui me narguent, et je me redresse, tremblante.
« -Allez, montres toi… »
J’entends un violent claquement, tandis qu’une décharge de douleur se produit répands dans mon dos, une autre suit bientôt, un cri de douleur m’échappe, je sens un liquide chaud se répandre sur mon dos, alors que ma peau se déchire sous les coups de fouet, mes mains à présent entravées dans des menottes attachées au béton. Je hurle de douleur pendant que les coups pleuvent tandis que je me rappelle une citation d’un bouquin que je lis souvent : « Le premier coup de fouet arrache la peau. Le cinquième déchire les muscles, et les os sont dénudés avant d’arriver à dix. Après quinze coups, des hommes meurent et personne n’a survécu au-delà de cinquante. ».
En face de moi apparaît l’image d’une piètre vaut’, des lamelles de peaux se décollant de son dos, le sang coulant lentement au sol, tandis que la chair est à nue, puis c’est une lame qui vient entailler le bas du dos, épargné par le fouet. Je serre les dents, habituée à la douleur. Les heures passent, les instruments s’enchainent, puis la silhouette noire finit par retourner entre les ombres…
J’articule malgré la faiblesse qui m’emplit
J’articule malgré la faiblesse qui m’emplit
« -Pourquoi, pourquoi tout cela ?... »
« -Tu ressens enfin mon incompréhension, la graine ayant fait germer ma folie… Tu sais à présent ce que cela fait… »
Mes larmes coulent au sol, tandis que ses bras m’enlacent, elle me fixe à travers notre reflet
« -Sois mienne… Soyons fusionnées, dans la vie comme ici… »
Je me laisse alors plonger dans sa froideur, celle-ci anesthésiant ma douleur, me réconfortant. Lentement elle tourne ma tête pour poser ses lèvres sur les miennes. Je m’abandonne à elle, trop épuisée pour lutter. Trop lassée pour la combattre.
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La grise
22 Décembre 2015
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