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[L'Insurgé] Indocile maîtresse.

Indocile maîtresse.


C'est la nuit qu'elle est revenue, sans prévenir. C'est souvent la nuit, dans ce smog étouffant et tardif, au creux impie de la nuance la plus sombre de son gris qu'elle pointe sa gueule charmeuse et grimaçante. Elle m'épie, depuis toujours, prête à me bondir dessus ou à s'insinuer quand je baisse ma garde, je le sais. Je la sens. Effrayante compagne, la plus tenace, résiliente harceleuse, traîtresse fidèle et fieffée connasse. Je la hais avec cette passion que je veux étouffer, je la rejette avec parfois cet espoir infini de la bannir à jamais de ma vie. Mais elle revient, sans cesse me harceler, tentatrice perpétuelle, acharnée, familière. Je lui tourne le dos et elle y plante ses griffes, je lui fais face et elle me rit au nez, provocante, insupportable, irrésistible. C'est mon poing qui la frappe, c'est ma gorge qui s'arrache à lui hurler de se barrer. Non pas toi... toi, reste... me quitte pas, mais va-t'en... va-t'en parce qu'Elle est là, et qu'elle me veut, qu'elle me prend, me possède, me ravage. Moi qui sublime le contrôle et vénère l'emprise, elle abat la sienne sur mon échine, me fait ployer, de dominant à suppliant. Elle gronde et sourde, passion vorace et feu sacré plus enivrante que mon envie, celle que j'ai de toi mais qu'elle corrompt et empoisonne, instillant son venin dans ce baiser fou à la fougue qui nous dévaste et me fait chuter comme les cendres sur le tapis. J'ai perdu.

Elle est rouge. Cramoisie quand elle crie, carmin quand elle bouillonne, écarlate sur ma peau, maculant mes phalanges, laissant un gout de fer dans ma bouche qui s'égosille. CREVE. Non, pas toi, pas ta gorge, la sienne, je veux l'étouffer, l'étrangler, la faire mourir et pourtant c'est elle qui ricane quand elle m'aveugle de son voile. J'ai perdu un instant. J'ai perdu l'esprit. J'ai perdu.

Ce n'était pourtant rien, rien qu'une étincelle absurde mais elle sait y faire, la putain. Elle sait parler mon langage quand bien même je la fais taire. Braise intime, détail infime qui déploie ses bras, enserre le souffle, le dévore, s'en nourrit pour s'en faire un festin, devenir un brasier qui m'aveugle, qui s'embrase, ronge et consume jusqu'à à l'outrance, jusqu'à l'outrage. Elle se pointe, masquée dans un sourire, dissimulée dans un innocent aveu, et plante sa graine toxique dans les mots anodins et froids qui s'échangent et peu à peur, s'effritent sous sa rouille, se décompensent et décomposent la raison. Le sens se perd, le sang monte, l'esprit bascule, le contrôle m'échappe. J'ai perdu.

Dans le fond de cet espace de verre, grelottant, tétanisé, blotti dans le froid irrespirable, mes entrailles vidées de cette bile acide, après avoir demandé grâce à genoux, impur pénitent, apostat impudique, je lave la honte de mon échec, de ma défaite. J'ai perdu le contrôle, je me suis perdu. J'ai perdu.

Demain, je la chérirai. J'en ferai mon alliée, mon amie, ma source, ma force, le carburant de mes combats et le terreau de ma victoire. Demain, c'est par sa force que je briserai mes chaines, que je clamerai ma révolte. Elle sera la fureur de mon bruit, la colère de mon feu, la furie de mes conquêtes, la hargne de mon combat, la férocité de ma volonté.
Elle sera mon feu, ma rage. Elle fera partie de moi.
Et je l'aimerai. Et je gagnerai.
Demain.
Par #Salamandre
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L'Insurgé
27 Août 2020
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