EDC de Saraï~66021
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L'Interrupteur
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"Quoi ?" Tu sais pas ce que t'as foutu au juste. T'es plantée là, les bras ballants, tout l'air vicié de tes poumons porté disparu. Tu voudrais qu'on déchire ton échine, chairs suintantes mises à vif, qu'enfin ton bordel intérieur se calme, que ton cerveau daigne changer de point de mire. Là, il bourdonne, et toi... Toi, tu continues d'essayer d'inspirer le vide. Tout avait mal commencé, pourtant. ......................"Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il se passe quoi ? Il... ?" Tu sais pas ce qu'il t'est arrivé au juste. T'étais là, un soir. Tu te faisais chier, comme tous les autres soirs. Tout allait mal mais tout allait bien. Et il a fallu que tu te prennes un élément perturbateur sur le coin du museau. Comme ça. Comme ces personnages dans les nouvelles à sensation qui se font assassiner par un écureuil acrobate sanguinaire échappé de sa cage1' , sans rien avoir demandé à personne. Juste parce qu'il fallait une victime. Servie sans même un petit présage à lire entre les lignes. Tout avait mal commencé........[i]"Je suis arrivée en retard. Je m'étais maquillée à la va-vite, mal. Tout ça parce qu'il fallait que j'aille voir. Pourquoi faut-il toujours que j'aille voir ? Il faut toujours que je pousse. Que je sache."Tu sais plus ce que vous vous êtes dit, tout ce temps. Au fond, on s'en fout. Ce que tu sais, là, c'est que t'as rien vu venir. Peut-être parce que t'es un peu con. Sûrement parce que t'es un peu con. T'attendais les coups de semonce pour reculer ; ta curiosité irrépressible t'a fait avancer jusqu'à sentir l'odeur douceâtre de la poudre. Doigts arachnéens tissaient déjà leurs toiles dans tes bronches. Puis, il y avait autre chose : ce goût de métal qui s'invitait sur ta langue. Envolée l'envie de t'auto-envoyer dans tes paradis artificiels. Jusqu'à l'envie de t'anesthésier t'échappait. Mal commencé............................................................................................"J'aurais mieux fait de me noyer dans ma fumée... Ils étaient où, les sachets salvateurs ? Plus ici, le corps qui s'engourdit. Littéralement plus ici, sacrifié au profit d'un autre. Pourquoi ?"Tu sais plus quand tu as su. Les questions te sont venues, superficielles, alors ton asepsie pérenne a commencé à craqueler. Déjà, elle rendait gorge de passions organiques, trop vibrantes pour être honnêtes. Tes compagnes devenaient compagnon unique, tyrannique. Transfigurées en il, elles n'étaient plus partageuses, le règne sur les scénettes qui animaient tes doigts était tout aussi farouchement solitaire que le plaisir offert. Mais ce n'est pas ça qui t'a fait te trahir à toi-même, non. Non plus le besoin, pourtant riveté à tes viscères, que ton talent pour nier l'évidence balayait sous le tapis.
C'est la crainte. La crainte poisseuse, infiltrée sous ta peau à force de petits grattements incessants. La crainte irraisonnée, irraisonnable, celle qui t'attire dans son tourbillon écœurant, qui s'incarne si facilement en toi, qui prend ta bouche et tes doigts. Tu passe d'impassible à harpie acide, comme ça. L'horizon du manque suffit à te faire faire n'importe quoi.
Fini, ça avait commencé. Mal, donc tu ne t'étais pas méfiée. Il aurait fallu d'entrée que toute l'affaire assaille tes lèvres de sucré sans l'amer......................"Ce n'était pas assez laid pour être vrai. De chaque médaille je n'aurais dû voir que le revers ? Il y avait déjà l'impatience sous le respect, les non-dits sous les semblants d'honnêteté brutale. Il m'est arrivé quoi... ?"Tu sais vraiment pas quel débile a décidé que c'était le cœur, l'organe de l'amour2', alors que clairement, c'est à tes inspirations que s'accrochent tes émotions. Elle y plantent leurs ongles sales, l'aspirent avec une avidité bestiale, sans pitié ni nuance. Elles prennent tout et te laissent là à étouffer, toutes prêtes à déclarer l'heure du décès. Tout à l'heure encore, elles te le coupaient juste, le souffle. Pour rien. Un sourire. Un regard. Des conneries. Et toujours pour mieux te le redonner après. Ta poitrine brûlait de cet oxygène neuf, méconnu. T'avais pas capté que ce n'était qu'un avant-goût. Les petits fours piment et chocolat avant la soupe aromatisée mort-aux-rats.
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"J'aurais préféré respirer"...................................................................................................................................
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"Va dormir, Saraï."
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"J'aurais préféré respirer"...................................................................................................................................
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- 1 Double assassinat dans la rue Morgue. Et c'était un orang-outan.
- 2 L'idée poumons = organe de l'amour est empruntée à Frédéric Beigbeder
◊ Commentaires
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Gasp~62046 (692☆) Le 09 Juillet 2018
* Très beau texte. -
Swen (528☆) Le 10 Juillet 2018
Joliment dit * -
Saraï~66021 (20☆) Le 12 Juillet 2018
Merci !