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Turbulences (3)

Une silhouette frêle rase à vive allure les pieds ternes des immeubles, à peine écorchée par les rares lampadaires encore en fonction de cette partie du secteur. Le smog est lourd. L'air viciée. L'ombre s'arrête sous le perron d'un immeuble miteux. Les quelques planches qui barricadent la lourde porte ne laisse aucun doute sur la présence de quelques résidents. Mais qui viendrait les déloger ici-bas ? Une patte qui se glisse dans un trench-coat étriqué. Une montre à gousset qui s'ouvre.
- Je suis en r'tard, en r'tard, en r'taaaaaaaard !
La bestiole piaffe, alors que le sol se mouche de grosses gouttes, collant la poussière du smog sur l'alsphate déchiré. Les pattes manipulent nerveusement le paractum qu'elle gardait sous son bras gauche - montre précautionneusement camouflée dans une poche - avant de le déployer, s'enfonçant dans une impasse noiraude.
Processus de clonage terminé.
Processus de clonage terminé..
Processus de clonage terminé...
Ouverture de la cuve.
Un pied indécis appréhende le sol, baiser glacé. Des phalanges frileuses agrippent le rebord de la cuve, s'y reprenant à deux fois. Les multiples signaux sensoriels l'assomment un peu plus, encore groggy par quelques substances analgésiques. Suivre la lumière. Un pas. Un autre, tout aussi exempt d'adresse. Il manque de glisser, muscles trop frêles. Ses pupilles accrochent la ligne qui s'électrise par moment. Suivre Sa lumière. Devant. Pousser la porte. Passer la porte. Une foulée. Une autre, gauche. La ligne bifurque, encore zébrée d'un point lumineux fuyant au loin, fugace. Suivre l'Ecureuil Blanc. Cette petite voix dans la tête qui le pousse à avancer. Celle qui lui chuchote à l'oreille de se dépêcher. De se presser. Plus vite. Encore plus vite.
Il fixe sa main gauche qui ne cesse de trembler depuis sa sortie. A côté de lui, ses vêtements sont étendus méticuleusement. Ses prunelles effleurent le gros cuir, non sans un pincement au coeur. Lui est nu. Encore plus que ce taudis aux murs écorchés. Des lambeaux de tapisseries se démarquent à peine entre les tâches de moisissures. D'autres. Plus douteuses. Il ne l'a pas quitté depuis une vingtaine de cycles. Recroquevillé dans un coin. Assis au centre de la pièce, genoux contre son buste. Allongé par là. Se griffant les bras. Se cognant la tête. Il ne supporte rien. Il ne se supporte pas. Cette sensation lui colle à la peau. Moite. Poisseuse. Il se sent souillé. Déphasé. Plus qu'une cinquantaine de cycles lui souffle une petite voix.

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Miroytements
28 Octobre 2017
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