EDC de Pixelle~42034

¤ Nous évoluons entre quatre murs assez hauts pour ouvrir notre imagination, à ce qui pourrait se cacher de l'autre coté.
Cette même imagination qui parfois parcours nos rêves ...ou nos cauchemars
Mais le chaos de la ville, son air putride, ses couleurs éteintes...nous en laisse-t-elle encore le choix?

C'est l'heure, les bars se vident peu à peu dans un silence qui en dit déjà long sur l'état des clients. Le regard flou pour certain, les battements de cils aguicheurs pour d'autres ou la noirceur de l'ivresse, tous abandonnent le comptoir pour s’immerger dans la nuit. Enfin presque ...la serveuse, elle profite de cet instant qui clôture sa journée, fait les comptes, essuie quelques tables collantes puis savoure la tranquillité...ou du moins sa solitude.
Qui se demande où la serveuse va finir la nuit ?

Elle repasse en allumant une cigarette, ces visages croisés, ces discussions futiles et celles qui méritent qu'elle s'en souvienne. Un homme à marquer sa mémoire, tant il semblait prisonnier de son monde. Le visage impassible, aux propos incohérents parfois et ce regard qui ne n'arrivait jamais à percer celui des autres. Il lui avait posé tant de questions sur ce Paria qui avait disparu, elle avait été troublé car qui pouvait encore se soucier de son sort, le temps avait eu raison de l'oublie.

      - Connaissez vous Tikran? Étiez vous proche ?Qui était sa famille? Qu'a-t-il fait pour avoir si mauvaise réputation? Pensez vous qu'il reviendra ? Que dites vous?

A chacune de ces questions des plus banales ou plus complexes. Elle s’efforçait d'y répondre, sans oser trop rentrer dans les détails, se perdant elle aussi dans ses souvenirs...ou dans ses rêves.

      - Peu après sa disparition...j'ai fait d'étranges rêves, aux allures si réels qu'un matin je retrouvais sur ma peau la trace légère d'une morsure.

Il était difficile d'expliquer cette histoire, elle n'avait que des brides de souvenirs ou avait elle tout inventé, pour se rassurer, pour ressentir encore une fois cet état où elle n'avait plus le contrôle.
Le client écoutait nullement surprit, plutôt intéressé d'en savoir plus, comme fasciné par ses divagations.

      - Que vous a-t-il dit?
      - ...Que je serais là seule à pouvoir le libérer?
      - Mais comment ?

Plusieurs heptades étaient passées, entre le moment des rêves et quand ils ont enfin rattrapés sa réalité ...Le fait d'en parler à un quasi étranger venait peu à peu de les relier entre eux .

La cigarette s'était consumée, ne restait plus qu'à quitter les lieux. Sur le chemin qui la ramenait à chez elle, elle n'y faisait pratiquement plus attention, mais son regard se posa devant le centre de cryogénisation à l'enseigne grésillante, d'où certaines lettres avaient perdu de leur éclat.

      - Je déteste cet endroit
Mais même en disant cela, cette nuit elle s’engouffra à l’intérieur, observant les rails, les caissons ... dans le silence d'un repos si glacial.

Elle s'approcha alors du terminal qui gérait le système de cryogénisation, demandant à voix haute le caisson de Tikran:
      - ID 38797
Le bruit mécanique du rail se fit entendre, le caissons avança dans l'allée de manière saccadé...puis soudain le retour du silence.

Elle hésitait encore, qu'il est triste de garder comme dernière image, celui d'un corps qui repose dans une boite, sans vie ...la liste est longue certains n'ont laissés aucunes traces.
La vitre translucide du caisson à hauteur du visage, était recouverte d'une pellicule de glace, impossible de reconnaître Tikran ,elle se retourna alors vers l’ordinateur pour demander confirmation de l'id 38797.
L'écran de la contrôle valida son choix affichant une photo de Tikran et la date de cryogénisation. C'est alors que d'une voix neutre, résonnant sur les murs et les autres caissons du centre, elle demanda:
      -Ouverture du caisson de l'id 38797

Toujours sur l'écran un message d'erreur: accès refusé ....mot de passe demandé
On ne perd rien à essayer se dit-elle. Elle se rapprocha du Terminal, remontant ainsi la manche de son trench, pour connecter son Silmérion à l'ordinateur, les signes vitaux de Tikran apparaissaient: tout était stable.
Elle chercha alors à se rappeler ce qu'aurait pu choisir Tikran pour s'enfermer dans sa cellule, entrant au hasard tout un tas de mots pouvant servir à déverrouiller le caisson...sans trop y croire: Isil091, Pixelle3456, Lilie0912...
Mot de passe invalide...tentez à nouveau votre chance
Elle allait même abandonner, se désolant d'être si naïve si folle, combien de personnes avaient tenté de libérer ces corps prisonniers de la glace combien ?
Dans une profonde inspiration, la dernière se dit elle, avant de trouver le sommeil...et si.
Ce nom prononcer par Tikran, ce rêve qu'elle devait oublier mais qui avait laissé tant d’énigmes.
Elle entra une dernière fois le mot qui lui venait à l’esprit, pas si au hasard que ça ...celui livré au creux d'un rêve.
En se concentra sur son écran pour entrer la combinaison... sa chance, les doigts tremblant légèrement sur le pad tactile: Aelinya229

Quand les rêves répondent à nos questions. Tikran lui avait pourtant dit de se réveiller...quelques délires, celui d'un esprit malade

9....Son attention fut détournée, derrière elle une voix éraillée résonnait elle aussi:
      -Que...faites...vous là ?
Elle se retourna pour apercevoir celui qui troublait son opération, il était dans l'allée. Elle avait du mal à distinguer son visage, seul des lueurs orangées émanaient de son regard, un nuage de fumée brouillait le reste sa vision. Mais elle savait reconnaître un vautour quand elle en voyait un, lui aussi sans doute venu se consoler. Alors honteuse d'avoir été surprise dans sa propre folie, elle débrancha son deck de la console sans même jeter un oeil sur ...le résultat
      - Rien ... absolument rien
Elle quitta précipitamment le centre, tête baissée bousculant l'inconnu sur son passage.
Pixelle réveille toi ....Maintenant!

L'histoire se termine au matin, quand elle se réveilla, persuadée d'avoir rêvé. La désagréable sensation d'avoir eu la gorge serrée.
Ce que nous appelons "rêves" ne sont parfois que les traits tirés de la réalité.¤