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EDC de Phylène

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L'Allumeur de la Lande Morte.





Quand nos mains se rejoignent, qui de nous deux la retire la première, gênée ?
Je vous annonce que c'est la fin;
Je m'en vais;
Au revoir.

Nous dansons autour d'une guitare, nos quatre mains créent ce quatuor désaccordé quand nous appuyons nos doigts sur les arêtes de métal.
La musique devient dissonante.
Qui de nous deux désaccorde la première les cordes ?

Nous partons toute les deux; Toi tu pars, Moi je reste.
Reste t-il un fil d'Ariane accroché à nos deux bouches ?
Nous partons toute les deux et moi, je disparais.

Sommes nous seulement encore attachées, enlacées ?
Nous tournons autour d'une guitare et notre avenir ne se tient plus qu'à une corde.

Un Saut de coeur plus tard.



J'étais de nouveau maîtresse de ce corps; J'aspirais par tous les pores de ma peau comme ma renaissance, ma Colère n'était pas mon péché. Et alors que je me plongeais dans la cave qui tenait lieu de bar, je me glissais en pensée dans une gangue de chaleur comme on se glisse dans le corps d'une femme.
La sueur humaine était partout, d'égouttait du plafond et les pierres semblaient renvoyer les danseurs comme les vagues sur une falaise. Le ressac au rythme de ce néo-punk très début année 300. Ce mélange de pop et de nouveaux instruments bizarres inventés par un groupe philosophico-influencés par les psychotropes.

On aime pas les gnolls. En Marran ou en Orion, on aime pas les gnolls. Fourbes, violents, morbides, des crocs, des poils, puants, sac à puces, dangereux; Autant de sobriquets qui montraient l'aversion que les gens avaient de se trouver en notre présence.

Je sentais tout. Je sentais les muscs des femmes libérées de leur timidité, je sentais les phéromones des mêmes hommes agités par le désir au contact des débardeurs qui suaient leur passion. Je décryptais les metas que la vague mélangeait aux autres. Sous la gangue rouge d'un plafond de pierre nue, je lisais les couleurs de la chimie des corps avec délectation, transcendais les espaces vomitifs et les bruits de verres clinquants, les éclats de voix joyeux. Dans l'univers poisseux de viande, là où j'aurai dû me sentir étriquée je sentais un nouveau souffle me prendre. Si j'avais pu sourire, sans doute l'aurais-je fait.

Mais j'arrivais comme une pierre au milieu d'une mare bien rangée. Les blocs se séparaient devant moi. Les regards lascifs s'étaient mués en haine ou en peur. Je m'en nourrissais tout autant.

On a sans doute pas l'habitude de voir un gnoll se bourrer la gueule. L'image est quelque chose d'important. Il m'avait fallut des années pour écraser ce besoin des hommes à nous voir comme des grosses peluches molles et agréables avec qui la discussion se terminait en entente gracieuse de pépiements amoureux. J'avais dû mordre des mains, arracher des bras et coller des crânes sur mon torse pour leur proposer une horreur qu'ils se refusaient à voir.

Mais pas ce soir. Ce soir je m'asseyais entre une jeune fille solitaire et un orc qui ne tenait pas l'alcool. Ce soir, je finirai sûrement à quatre pattes sans le vouloir pour vomir mon chagrin au lieu de l'affronter.



Ce n'était plus la plaine en flamme que j'avais l'habitude de côtoyer.
Les feux s'étaient éteints.
Il ne restait qu'un voile pâle sur une lande inerte et stérile, silencieuse.
Quelque part, quelqu'un pleurait.



On ne sait jamais à quel moment une bagarre éclate. Est-ce que quelqu'un a volé le verre de l'autre, est-ce qu'un coup d'épaule maladroit et un peu trop franc a désarçonné la mauvaise fille, est-ce que l'un des membres de son groupe a voulu jouer au héro pour nous impressionner.
Et un massacre ?
Comment la colère éclate quand votre inconscient vous fait lire des lignes que vous ne vouliez pas voir. Comment une anecdote se transforme t-elle en boucherie ?

J'ai toujours su garder un minimum de sang-froid. Peut-être que cette fois était la fois de trop. Peut-être que mon instinct avait parlé au-dessus de l'alcool.
Peut-être un peu tout à la fois.
Mes oreilles entendaient vengeance. Dans la bouche de chacun, dans leur rire insupportable, dans les hoquets de mes voisins.

La jeune fille avait déjà compris quand elle a posé sa main sur mon bras. Pouvait-elle comprendre tout le ressentiment qu'il y avait dans mon regard à l'instant où je lui ai brisé la nuque. Pouvait-elle comprendre ma douleur à travers ce voile de colère quand ses yeux se sont écarquillés, et son corps sans vie tombant dans un bruit mat sur le sol en suivant le mouvement de panique pouvait-il me pardonner ?

Je ne me souviens pas de tous leurs visages, en réalité, je ne me souviens de presque rien. Seulement l'odeur de métal et celle de la poudre qui a parlé pour tenter de m'arrêter.

J'étais au milieu d'une mare rouge.
J'étais chez moi. Entre le feu et le sang.



Il n'était plus chaud, ce corps; Comme s'il avait cristallisé dans l'instant effroyable, comme une seule vague de marbre l'avait pris d'un seul coup.
Et statue devenue blanche aux veines noires d'un sang infécond.
Immobile.

Ce n'était plus le feu d'une haine vivace, c'était la torréfaction d'une glace devenue neige, la poudre abattue comme avalanche qui soude les hommes en fuite sous les gravats de ses milliers de cristaux.

J'étais vivante.
Je suis morte.
Et me voici devant Vous.



« Aaarh, Putain d'merde. Ça fait du bien. Elle est pas dégueulasse la bière ici.»

Il avait toujours l'art de débarquer comme une fleur, n'importe où, n'importe comment. Vous devez m'imaginer toute ingénue que j'étais la première fois que j'ai rencontré un premier-né. Je le prenais pour un Dieu. Et il était là, à remonter sa braguette en sortant des toilettes pour femmes. Connard.

« Tu peux pas être là. Tu peux... T'es sensé être... »
« Ouais, je sais boule de poils, mais t'avais l'air paumée. »

Il aurait jamais dit ça. Il aurait jamais été aussi tranquille avec ce sourire de type qui sait ce qu'il fait.

« T'es fière de toi, hein, boule de poils ? »

Ignis. À fumer ses affreux joints qui lui donnaient un sourire de déterré, ses yeux enfoncés dans ses orbites comme si j'y avais déjà donné des mandales.

« Avec tes foutues Guerres qui sont la raison de ton existence. Et à quoi ça t'amène, hein ? Tu penses qu'on peut jouer contre DreadCast ? C'est ça ? Regarde nous ma grande, t'es pas spéciale, t'as rien d'plus que les autres, pas d'Destiné, rien d'tout ça. T'es juste bonne à t'faire trouer la peau et t'faire trahir. T'es bonne qu'à ça...»

Collins était là lui aussi, attablé d'un coude à une table qu'il avait relevé lui-même, une botte dans le sang d'un des pauvres hères qui avait subit ma colère. Il fumait. Il fumait avec cet air goguenard qui savait. Qui savait tout.

J'avais la rage. Une rage que j'aurais voulu voir déferler sur tout, sur eux, engloutir la ville, les murs. Et surtout. Moi.
Au milieu des deux premiers-nés comme au milieu de deux amis. Deux très anciens compagnons que je n'avais pas vu depuis longtemps.

On était de la même race eux et moi. De la même sorte. On avançait sur le cadavre de chacun de nos sacrifices. On avançait à contre-courant. Pas contre les autres, simplement pas dans le même sens. Peu d'alliés, pas d'amis, des monstres d'égoïsmes pour un but débile et utopique.

Je me souvenais des mots d'Aessa. Je n'avais que 40 ans à côté de ces Titans et pourtant, je me sentais proche d'eux. Si proche, et si loin. À me débattre dans une mélasse où la médiocrité et la faiblesse m'agrippaient comme les pattes d'une araignée m'aurait entraîné dans sa toile.

J'étais arrivé à la séparation de deux mondes. Une fracture terrible que je ne pouvais me soustraire à traverser. Une frontière que mes mots avaient passés, pas mon âme.
Elle était devant moi, et l'instant suivant disparue, et s'était échappé quelque chose.
Quelque part, quelque chose que j'avais enfouis au plus profond de mon âme avait courue sur ses talons en m'abandonnant, là, seule avec ma haine et mes colères.



Je l'ai vu partir sur ses talons, une traînée de poussière s'accrocher à son bras en regardant une seule fois en arrière. Était-elle triste, me prenait-elle en pitié ?

Je l'ai vu disparaître et la porte passée c'était fait. Quelque chose manquait comme une pièce au puzzle, quelque chose de doux et chaud qui devait allumer quelque part les feux brillants et tumultueux de cette lande morte.

Quelque part il devait bien y avoir quelqu'un.

Où était-il l'allumeur de cette lande inerte ?



Tous n'ont pas la chance de suivre un entraînement. La plupart ne sont pas implantés. Certains n'ont même jamais levé une arme.

Le claquement net de sa nuque entre mes pattes avait eue l'effet d'une décharge comme si je ressentais tous les déplaisirs d'un collier électrique autour de mon cou. J'avais eue le temps de décanter ma haine, et comme une furibonde tout s'évaporait d'un seul bloc.
Je devenais le centre d'un cyclone prêt a tout ravager sur mon passage, et cette pauvre fille n'était qu'une bicoque sur mon chemin. Il en faudrait d'autres. Il en fallait d'autres. Plus de corps, plus de cris.

D'un geste ample et mesuré je sortais mes Azmats en maximisant le rayon d'action. Moins de dégâts, plus de souffrances, plus de cris. Quelqu'un a crié avant que les décharges bleus n'envahissent l'espace sonore. Les vitres ont explosées en même temps que les lumières et les bouteilles qui faisaient la fierté du bar. Sous un voile rouge les premiers cris de souffrances hurlaient comme des mutants nouveau-nés en chasse. Un homme a tenté de protéger sa femme avant qu'un projectile ne perfore leur occiput et ne barbouille de sédiment le groupe qui se levait derrière eux sans comprendre.
J'étais une maîtresse des éléments en colère, et après la foudre je faisais tomber la pluie. Douze projectiles avaient fait mouches avant que les premiers mouvements de panique n'atteignent la foule. L'orc à mes côtés n'a pas eue le temps de saisir sa hache avant que je lui enfonce ma hallebarde dans le sternum jusqu'à la garde. En le clouant au mur, je goûtais la salive de son impuissance du bout de la langue. Une excitation morbide me tenait là, entre moi et ses yeux qui devenaient blancs alors que la vie le quittait.
Des éclats de mur explosèrent au dessus de moi. Le kevlar avait arrêté une balle, les deux autres avaient foré un petit trou dans le mur et l'orc.
L'humanoïde standard tenait à bout de bras un magnum à lunette modifié.
Il tremblait.
Je fus sur lui en deux bonds. Un coup de crocs avait suffit à lui briser le coude, un coup de poing à lui briser le nez et à le faire tomber en chute libre sur une table. Désarmé, je vidais son chargeur sur la foule qui se pressait à l'entrée de la cave en hurlant. Trois coups supplémentaires perforaient les cages thoraciques des malheureux. Trois coups vociféraient dans l'alcôve, rebondissaient sur les murs en criant mon nom. Vengeance. Vengeance.
Je goûtais la peur des cadavres et les cris de souffrance de ces nouvelles abominations que j'avais créés. Rouges de sang, noires de suie qui levaient une main désespérée vers une aide qui ne viendrait jamais.

Ces corps ne mourraient pas facilement.
Je ne leur offrirai pas que la peur, mais les mensonges, les calomnies, les trahisons.

J'ouvrais l'aube d'un nouveau massacre en allumant les vannes de gaz et en répandant l'alcool sur les flammes qu'avaient donné naissance les sillons de mes balles.

Les explosions avaient dévoré derrière moi les restes des corps morts et ceux des vivants.

Une mélodie offerte au Chaos.
Le hurlement des suppliciés qui éclataient au son des chaleurs infernales d'une cuve de fioul en proie à la mort. Le sifflement de la chair pétrifiée sous les flammes en libérant ses poches de graisses.
Une odeur de brulé se répandait dans tout le Quartier Sud.
J'avais faim.


Quelque part, enfouit profondément, une petite âme simplette et naïve suppliait encore le monstre.
« Tu avais promis. »

J'ai regardé longtemps ce bâtiment en flammes.
J'ai écouté la Mort prendre sa revanche sur les immortels, sur les pauvres, incapables de se payer un clonage ou une deuxième enveloppe.
J'ai laissé la cendre recouvrir le sang de mes monstruosités et l'odeur de la chair brûlée s'accoupler avec douceur sur mes parois nasales.

Comment les gens disparaissent-ils vraiment ?
Est-ce que lorsqu'ils meurent, leur âme rejoint un autre centre pour les soigner.
Les
folies qu'ils ont commises, les horreurs, les peines et les erreurs, les hantises et la haine sont-elles épurées pour n'y laisser que la tendresse et la douceur.
Si moi je meurs, y aura t-il quelqu'un pour me pleurer ?

Informations sur l'article

[RP] Bruine
09 Octobre 2020
998√  41 5

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◊ Commentaires

  • Sha-Sha (86☆) Le 09 Octobre 2020
    *
  • Izaline (18☆) Le 09 Octobre 2020
    [*]
  • Aexe (120☆) Le 09 Octobre 2020
    "Quelque chose manquait comme une pièce au puzzle, quelque chose de doux et chaud qui devait allumer quelque part les feux brillants et tumultueux de cette lande morte."

    *
  • Kemelvor (1243☆) Le 09 Octobre 2020
    A couper le souffle
  • BB_24 (266☆) Le 09 Octobre 2020
    « Et d'hiver en été, il pleuvait. Les températures n'avaient plus d'impact sur mon corps. Gelé, il n'attendait qu'une flamme pour retrouver sens. Ou le sang. Encore vibrant, chaud. Douce couverture aux relents métalliques. Vivante. »