EDC de Phylène

Les pigeons ont cette sale manie d'être là où on ne les veut pas. Ils rôdent autour des poubelles mangées aux mouches, autour des places où parfois âme qui vive vient se réfugier. Les pigeons sont cette étrange peste que les rats côtoient dans les souterrains. On les déteste, ils sont petits, sales, laids. Ils n'ont qu'un désir, qu'un besoin : Manger.

Le pigeon, cette sale race de vautour, ils s'abaissent aux pires médiocrités, il n’exècrent rien, ils dévorent tout ce qui est à leur portée. C'est un festival de carnage qui inhibe toute empathie à leur égard. La viande, le plastique font un somptueux repas, les miettes, la merde, forment leur habitude.

Ils sont bruyants, souvent en bande, et si l'un d'eux navigue tout seul, attendez vous à ce que tous ses congénères pullulent près de lui dans quelques minutes. C'est de la vermine.

Ce matin, j'ai ouvert la fenêtre. Le smog y est entré comme les autres, tonitruant et roucoulant. D'abord un, puis deux, puis trois... Ils bouffent mes déchets, c'est plutôt pas mal. Je sais pas comment font les autres pour tenir un appart' propre... Ils ont surement lu un truc dans un bouquin de l'Uni...

Tête de Piaf.

Ça faisait longtemps que je n'avais pas ouvert ma porte. Je ne sais pas trop ce qu'il m'a pris... Même aujourd'hui encore je me le demande... Son plumage était plutôt propre et net. Lui aussi il est arrivé en roucoulant. Il puait le mâle en rut. Dès que je l'ai vu, je me suis dit que j'avais fait une connerie... C'était comme s'il suintait sa propre déchéance par tous ses pores. Lui aussi, il était surement de ceux-là qui sont prêt à tout pour voir un morceau de plume qui dépasse de ton corsage. J'peux pas dire que ça m'amusait pas de le faire espérer...

Plus longtemps encore que j'avais pas pointé le nez dehors. J'vous dirais, j'en avais rien à foutre, le smog était aussi chez moi. Mais bon, j'me sentais un peu seule, et les séries et les films commençaient à tourner en rond. Il me fallait de l'air, et un skiwi. J'ai laissé mon pigeon sur le carreau, j'ai pris mes... Bref, j'y suis allée.

Parmi les vapeurs corrosives de la ville qui suintait de désespoir, je retrouvais son brouillard magistral aux arborescences lumineuses. Ses flashs hystériques, ce bourdonnement constant, cette acuité ridicule.
Les rues sont froides, linéaires, inhumaines. Les gigantesques panneaux de milliards de pixels vomissent l'exutoire par de savantes épitaphes, la voix puissante et dogmatique d'un androïde qui parle à travers les mégaphones :

" Les cristaux farins sont notre avenir, récoltons les. "

Rien n'a changé, même pas moi. Je me retourne toujours à chaque pas, je fuis les silhouettes au dessus des bouches d'égouts et les clochards qui puent la pisse.

À l'Ange qui Bourgeonne; La Cuve.

Hier soir c'était ma première fois. Ça n'a jamais été le truc auquel je pensais le plus. Bon, bien sûr, ça m'avait traversé l'esprit, mais, j'étais entre... sérénité et une excitation malsaine de la chose.

Finalement, ça n'est pas si grave de mourir. Je me l'étais imaginé comme quelque chose de terrible et foudroyant, ajoutez à cela un peu d'extrapolation, deux trois pincées de paranoïa et le cocktail aurait été digne d'un film de Michel la Baie. Foudroyant ça l'était... Et même si je me suis retrouvée aussi molle qu'un ragoût d'écureuil en gelée... C'était pas si terrible.

Bon, au final ça m'arrange. Maintenant c'est fait...

Je ne peux pas dire que je me soit entièrement remise de ma mort... En fait, il y a juste ce petit truc... Je me demande ce qu'il y aura la prochaine fois.