EDC de Ornis~72413

6h2 de l'aprèm. Centre de Cryogénisation du Secteur Orion, étage 4, bloc 25, allée 19, rang 20.



Des fois je t’en veux. D’être parti. De m’avoir laissé seul. De m’avoir tout laissé à gérer.

Ton corps endormi dans la même position le soir en rentrant.
Tes yeux que je n’ai pas vu ouvert depuis des jours.
L’angoisse. Je sais ce qui arrive, même si je ne veux pas me l’avouer.
Les questions des autres, qui ne t’ont pas vu depuis longtemps. Et moi non plus. Parce que je passe toutes mes putain de journées à te regarder dormir, de peur de louper un de tes rares sursaut de vie.
Tes yeux qui ne s’ouvrent pas alors que je t’appelle, alors que je pleurs que tu ne me parles pas, ne m’entendes pas, ne me répondes pas, ne me répondes plus depuis des jours.
Les lumières froides sur ton visage immobile, quand la brigade de cryo est venu te chercher. Quand je les aie supplié d’attendre, encore un peu, un jour, une heure, une minute, vous allez voir trois fois rien je vous en supplie ne l’emmenez pas loin de moi il va se réveiller je vous jure il va se réveiller il va se réveiller il va se réveiller.
Ton appart vide le lendemain. Tes affaires qui traînent encore partout. Ton odeur qui s’attarde. Et ma solitude qui rôde entre le lit et la cuisine.
L’espoir, quand je t’ai vu, encore endormi dans le couloir. Et le rechute. Pareil que la première fois. La brigade de cryo, tes yeux toujours fermés, je vous jure qu’il va se réveiller. Encore.
Une deuxième putain de fois.

Pourquoi ? Pourquoi, tu as fait ça ? Pourquoi m’avoir fait croire que tu allais revenir ?

Est-ce que tu as lutté ? Tu ne voulait pas me laisser seul ? Dis-moi que tu es revenu pour moi. Dis-moi que tu as essayé de te réveiller, de toute tes forces.

C’est facile pour toi. C’est facile. Tu t’es juste endormi, un matin, dans ton lit, et tu ne t’es jamais réveillé. C’est facile. Doux, tranquille. Pas de soucis. Pas de colère de tristesse de solitude de désespoir de larmes de cauchemards.

Pas d’explications, et démerde-toi avec le reste.