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C'est l'heure. Je m’injecte une double dose de Kronatium, puis j’équipe mon casque d’interface neuronale de navigation cyberinformatique. Mes yeux sont recouverts de lunettes d’immersion virtuelle, mes mains commencent à pianoter sur mon Hypérion.
Le signal monte directement sur la trajectoire du satellite qu’il devrait croiser dans quelques secondes. Je sais que la fenêtre dont je dispose pour l’intrusion dans les systèmes de ce satellite SecuWatch VI n’excèdera pas 15 secondes. Juste le temps que la rotation de la planète le fasse sortir des possibilités de visée de mon système. J’essaye de faire le vide dans ma tête avant la connexion. Je sais que j’ai droit à un essai, un seul.
Soudain mes protocoles s’interfacent sur la ligne d’entrée secondaire que j’ai découvert par hasard lors de mon précédent scan superficiel du satellite. On ne peut pas trop jouer avec ces engins des cybercorporations. Ils sont bardés de pare-feux, de protections, de capteurs et sous la surveillance constante des cyberflics de NetProtect. J’ai donc mis à profit le délai d’un mois avant son nouveau passage pour préparer mon attaque.
Un flash rouge se met à clignoter, d’un geste de la main je pénètre dans mon espace virtuel. L’image du satellite laisse la place à un entrelacement de courbes irrégulières colorées qui bougent et se reproduisent à l’infini telles des fractales. Un point noir au milieu grossit très vite, symbolisant la porte d’entrée. Je connecte les fils simulant mon réseau avec une minutie et une lenteur exacerbée par la simulation Réalité Intra-V. La première seconde passée en temps réel s’affiche déjà en sur-impression dans mon imageur.
Je transpire mais mes mains virtuelles restent sèches. C’est maintenant que tout va se jouer, je sors de sa boite un petite boule bleue. C’est la modélisation virtuelle du vieux virus Wallach IX, inutilisé par les hacker depuis trois ou quatre décennies. En plus de la découverte de cette backdoor, mon pari insensé est de me cacher derrière ce virus.
Son obsolescence, et sa sortie de la bibliothèque des antiviraux de pointe dont sont équipés de tels satellites, doit me faire gagner de précieuses secondes et brouiller les pistes. Je table sur le temps d’analyse et de redéploiement des systèmes de sécurité actifs pour forcer le passage.
Je pianote comme un fou, des lignes vertes viennent se superposer sur la porte. Le virus, tel un petit pacman bleu tourne autour de moi, sans me manger. Mon propre système est immunisé contre lui. L’horloge m’affiche le temps déjà écoulé : 1.456 secondes. Je réaligne les flux d’information, fait tourner mon scanneur à fond. Deux lignes vertes sont alignées autour de la porte. Je dois accélérer, les systèmes anti-intrusion ne vont pas me laisser encore longtemps devant le satellite sans réagir.
2.186 secondes. Une troisième barre verte surmonte la porte devant laquelle se presse Wallach IX. J’arrive à la limite de tolérance que ce type de système peut accepter. J’enclenche le séquenceur de phase en croisant les doigts mentalement. J’entends le sang battre contre mes tempes, c’est pas le moment de flancher.
2.823 secondes. La porte passe au vert, ma main se pose sur la clenche, j’ouvre et laisse s’engager le virus. Il part immédiatement tout droit devant lui, passe les deux gros molosses hérissés de pointes et de lames aiguisées comme des rasoirs qui symbolisent les gardiens du système. Je lui colle au train, mon fil d’Ariane se déroule derrière moi, c’est mon assurance vie, la certitude de pouvoir m’extraire du SecuWatch en clignant des yeux.
La boule bleue commence ses ravages dans les systèmes bioinformatiques du satellite. J’ouvre mes piles à données holographiques Itanium et je commence à siphonner tout ce qui se trouve à ma portée. Des teraoctects de données que j’analyserai plus tard. Avec de tels systèmes pas le temps de faire dans la finesse, il faut balancer le filet, remonter tout ce qu’on peut et trier plus tard.
La boule bleue commence ses ravages dans les systèmes bioinformatiques du satellite. J’ouvre mes piles à données holographiques Itanium et je commence à siphonner tout ce qui se trouve à ma portée. Des teraoctects de données que j’analyserai plus tard. Avec de tels systèmes pas le temps de faire dans la finesse, il faut balancer le filet, remonter tout ce qu’on peut et trier plus tard.
8.683 secondes. Je suis en transe, je tremble. Mon compagnon et moi sommes arrivés au cœur du système du méta contrôle. J'utilise ma deuxième Itanium.
11.487 secondes. J’en suis à la troisième pile. J’en ai seulement quatre dans mon sac à dos. Ce satellite est bourré de données. Wallach IX est redoutable, je vois des pans entiers du système s’affaisser. La sécurité intelligente détecte les flux intrusifs mais l’intelligence artificielle du satellite ne semble pas savoir réagir.
11.671 secondes. Dans mon imageur trois grappins émergent de la planète à l’assaut du satellite. Je sais ce que cela signifie : les cyberflics. Les anomalies ont été détectées et télétransmises aux centres de surveillance NetProtect. Ils ont réagi encore plus vite que je le pensais. Trois fantômes noirs à la forme hideuse arrivent tels des missiles tactiques en remontant les connexions établies par les grapins virtuels.
11.896 secondes. Ma quatrième pile est remplie. Je sais que je n’ai aucune chance de lutter contre ce type de cybergardes. Leur matos est beaucoup trop évolué. Je déclenche mon rappel le long du fil d’Ariane qui se dématérialise sans laisser de traces sur mon chemin. A la vitesse de l’éclair je rebrousse tout mon itinéraire. Les trois fantômes entrent dans le système.
12.007 secondes. Un des cyberflics branche son système de diagnostic dans le cœur de silicium du biosystème, les deux autres sortent leurs annihilateurs et s’engagent dans les couloirs du complexe formé par le logiciel. Au même moment je referme la porte virtuelle et coupe mon signal masqué de poursuite du satellite.
C’était vraiment moins une comme on dit… Je suis en transe. Je contemple les quatre piles de données que j’ai réussi à moissonner dans l'infraspace virtuel. J’enlève mon casque et mes lunettes. Je suis trempé de sueur, mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine. Je m'adosse contre le mur. Je sais maintenant que ce n’était pas le sat d’une quelconque cybercorporation. Au dernier millième de seconde j’ai aperçu l’écusson ornant la combinaison d’un des fantômes : une hélice triple sur rond rouge.
Atterré, je me rends compte que je viens de hacker le satellite du DI2.
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19 Mars 2012
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