Recherche

EDC de L-X

Bienvenue sur les EDCs de Dreadcast
Vous trouverez ici tous les articles rédigés par L-X

Cacher

La douleur... - 6 (par L-X)

Auteur : L-X
Et soudain, le silence.
Rythmé par le doux balancier du temps.
Froid. Immobile. Indicible.
Comme saisie sur le vif au cœur d'un cocon de glace, elle se retrouvait témoin de sa propre vie, groggy, docile, dépourvue de volonté. L'enfant-robot n'était désormais plus que robot. Ce n'était pas paisible et serein comme elle l'avait espéré. C'était juste "rien". Le Vide. Une absence d'état qui n'est pas un état. Une négation. Un négatif. Rien de positif.
Par-delà son miroir, elle voyait la vie se dérouler, entendait les plaintes et les complaintes des souffrants, des émus, de ceux qui vivaient encore. Leur tristesse à son encontre, leurs reproches muets ou exprimés, leurs larmes parfois, ou même des actes insensés pour la faire vibrer : tout la laissait de marbre.
Indifférente.
Imperturbable.
A leurs questions, elle donnait des réponses. A leurs inquiétudes, elle offrait sa logique.
Certes, d'aucuns s'amusaient à jouer "au robot", la mettant face à des paradoxes, jouant de ses contradictions. "Et sinon... Tu préfères un bras de 9 mètres ou une jambe en mousse?"* "Je me mets une balle dans la tête ou je le tue : qui tu sauves?". Qu'espéraient-ils au juste? Qu'elle leur donne une solution universelle dépourvue du parasitage émotionnel? Ou qu'une surchauffe la fasse bugger? Au final, la première émotion à percer la coque de son indifférence fut l'agacement. Pas la meilleure. Pas la plus belle. Même pas la plus humaine pour celle qui ne l'était plus. Juste une pique, parfois, rappelant à celle qui hurlait en silence, coincée derrière la glace, qu'elle était toujours en vie. A peine.
Derrière cet écran, l'être de silicium et de chiffres, reprogrammait à nouveau. Une réécriture par dessus les biffures, encore. Plus nette. Plus claire. Sans hésitation. Juste des nouveaux paramétrages en mode sans échec.
L'être de chair avait beau hurler, nul ne l'entendait. Parfois, un gémissement parvenait à franchir la barrière de glace virtuelle, tordant ses cordes vocales pour sortir de sa gorge nouée un son odieux, strident, comme le grincement d'une mécanique froissée.

Las! Le programme fut à nouveau interrompu avec fracas.
Dans une indifférence quasi collective, le grand méchant loup pointa sa gueule en biais dans la tanière des lapins pour y enlever sa proie gynoïde, revendiquant son "kidnapping" sans que grand monde ou presque s'en formalise. Tout juste, le grand manitou des lapins fit remarquer que le grand méchant loup avait osé pénétrer le clapier "privé" et protesta avec la véhémence d'un lapin en colère.
Heureusement, plus personne en ce monde ne savait ce qu'était un lapin ou un loup...
Quoiqu'il en soit, détachée de sa propre condition de captive, la gynoïde restait passive jusqu'à l'acide susurré à son oreille: "Allons tuer Maatheo avant de partir...". Du fond de son coma émotionnel, l'esprit logique enregistra l'attaque sur son protocole prioritaire et tenta de faire réagir la machine. Faiblement, elle essaya...
Avec une claque sur le nez, ses velléités de défenses furent calmées brutalement : plus de son, plus d'image.

Interlude.
"... alors? Choisis un nombre entre 1 et 219..."
Reload.
137.
Un chiffre au hasard.
Le hasard est la forme que prend Dieu quand il veut passer incognito**. Mais à Dreadcast, Dieu n'existe pas. Seul l'Enfer a encore un sens. Pavé de rage, débordant de haine, vivant de colère.
La colère. Jusque là, la plus primale des émotions était jugulée par des protocoles, artificiellement et naturellement bridée. Et voilà qu'elle venait d'être brutalement implantée. Coulant dans le corps de la gynoïde comme un flot de lave, la rage dévasta la re-programmation, pulvérisa la quiétude synthétique, broya les lignes de codes, déchira la toile rationnelle pour en faire des confettis de braise...
Une puce. Rien qu'une puce. Et l'IA fut soudain écrasée par une inconnue, submergée en son domaine par quelques milligrammes de silice au codage plus primaire que binaire. Les insanités proférées par la bouche délicate n'étaient rien comparées à la tempête fondamentale qui sourdait de tout son être et parcourait son système nerveux couplé de cuivre, y répandant son mal à la vitesse du traitement de l'information : instantanée.
En quelques heures, l'enfant-robot au corps de femme dut faire face à un nouveau monde et composer avec un nouvel être : un nouveau soi déconcertant, inaliénable et surtout inaltérable.
Une fois de plus, elle évoluait.
Avec pertes et fracas, cette fois.
Au passage, d'autres protocoles émanant de son nouveau primarus furent implémentés avec la délicatesse d'un charcutier pratiquant la neuro-chirurgie. D'une main de chrome, par la force et l'autorité...
Accessoirement.
Certains furent jugés futiles et assimilés.
D'autres rapidement neutralisés ou balayés.
Quelques uns furent contenus ou mis de côté pour "traitement ultérieurs".
L'IA établissait ses nouveaux protocoles et traitait les informations selon une logique froide.
Bizarrement, les gens qui vivaient la nouvelle L-X n'avaient pas les mêmes priorités...

Spoiler (Afficher)
*Pierre Palmade
** Albert Einstein.

◊ Commentaires

Aucun commentaire