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Un dernier rire...

Une villa du SI.
Le 3/272.3 à 22ch30.
(Musique !)
Le cyborg somnolait à moitié, affalé dans un confortable fauteuil, emmitouflé dans une couverture bien inefficace à contenir le froid sournois qui s'emparait de lui.
C'était un lent combat thermo-dynamique, d'un corps immobile avec pour seul stimulis dans la grande villa le son et l'image des reportages et des flash infos abrutissants qu'un gigantesque écran holo diffusaient depuis l'autre côté du vaste salon.
Le froid commençait son œuvre vicieuse, en posant ses doigts quasiment imperceptibles sur le haut de son dos, près de la colonne vertébrale, caressant lentement, presque sensuellement, sa peau au travers de la couverture pour glisser le long de ses dorsaux, de ses biceps, de sa peau et de sa nuque...
... Déclenchant la réaction corporelle, un mouvement introduisant de la chaleur, sous la forme de légers frissons, qui allaient en s'intensifiant, quand ses pensées avaient le malheur de dériver du point d'accroche préformaté pour s'abîmer en lui... Pensant, souvent, a Elle...
Les nombreux canapés de l'autre côté du salon étaient bien plus confortables, mais ils portaient bien trop de souvenirs encore...
Ces derniers jours, ils les avaient passés ainsi, ou alors tournant nerveusement en rond dans une de ses propriétés, en armure, fumant clopes sur clopes qu'il achetait à nouveau, réfléchissant, inventoriant, communiquant.
C'est dans ces moments-là qu'il frissonnait le plus... Alors pourtant, qu'il sentait un magma brûlant, une orbe rayonnante tel du plasma, couler dans son crâne, bouger, en flux et reflux, derrière son œil, coulant dans ses veines... Une Lumière invisible, qui révélait ce qui se cachait dans la pénombre.
Une clarté qui brille même là où la Lumière meurt... Dans le Vide, intérieur, le plus total.
Le cyborg inspire lentement, calmant par là même, presque instantanément, son souffle et son cœur qui s'emballent légèrement... Mais il est interrompu par un léger signal visuel de son com', sur le bureau proche.
C'est en grognant à sa manière habituelle qu'il sort le bras entier de la couverture pour le prendre, sa main en étant déjà sorti pour vagabonder vers sa sulfateuse par réflexe, avisant le message... Et le relisant par deux fois avant d'y répondre, lentement, comme beaucoup de choses qu'il fait à présent.
Il se lève ensuite, enfilant lentement son armure, ignorant une fois de plus les frissons qui vont jusqu'à gêner la tâche. Il jette enfin son cosmo' dessus, fin prêt, avant de prendre le pas de la sortie, modules à la ceinture.

Une ruelle dans le sud du SI.
Le 3/272.3 à 22ch45.
Le cyborg naviguait dans les artères puis les veines du SI, un passager invisible, inéluctable, qui ne faisait rien pour masquer le bruit de ses pas qui trahissaient sa présence. C'était peut-être le mieux, de faire entendre le poids de l'armure, pour dissuader la faune en embuscade.
Il n'a jamais eu besoin de galons, ou de statuts pour cela...
Soudain, un visage croisé, encadré par des plumes sombres, fait rater à son cœur un battement... Alors qu'il se rend compte presque instantanément s'être trompé...
Sa main droite pianote doucement sur sa jambière, seul signe de son émoi au travers de l'armure... Alors que, de nouveau, cette sensation d'acide transperce ses entrailles.
Heureusement, il est arrivé a destination... L'ex-Alte Nobilis le rejoint rapidement, encore frigorifiée, puis l'Impérial Blanc, le sauvant des mots qu'il n'arrivait pas à trouver.
Il parle lentement par le deck de toute façon, ayant juré de garder le silence tant que Ses Enseignements sont bafoués...
Il aimerait lui en dire des choses pourtant, alors qu'ils l'écoutent et suivent ses instructions... Mais il n'a jamais été doué avec ce genre de mots. Avec les sentiments tout courts en fait.
Il ne peut que la regarder et l'écouter, la regrettant déjà, la fixant peut-être un peu trop pour la graver dans sa mémoire.
Même s'ils avaient beau déjà s'être fait leurs adieux auparavant... Ceux-là seront irrévocables, et il ne manque pas de lui en faire part...
Ils vont la perdre. À jamais. Ce petit bout d'humaine recelant une force indomptable, au parler aussi vulgaire que franc qu'il avait aussi vite apprécié qu'il avait pu parfois le soûler.
Mais rien ne pourra la faire changer d'avis, encore une fois. Elle aussi avait eu tant de projets...
À nouveau il sent le magma brûlant, a peine contenu par son front dont il passe lentement la main sur la surface organique, redressant la tête pour voir la conversation se terminer après quelques cycles.
Elle s'approche de L'Impérial Blanc qui l'enlace, se murmurant de dernières paroles, avant de venir faire de même avec lui...
L'impression de déjà-vu, comme au Haut-Conseil il y a peu, rend le moment encore plus insoutenable... Il tapote un peu rudement son dos, hésitant un instant à la retenir.
Mais il n'en avait pas le droit. Personne n'en avait jamais eu le droit autre a part elle... Surtout maintenant, c'était peut-être la dernière miette de libre-arbitre qui leur restait.
On se salue ensuite... Pour la dernière fois, les torses se bombent, étouffant un instant les feux qui couvent et s'agitent douloureusement en leurs seins...
« Messieurs...Qu'Il vous guide. »
Elle a disparu.
Un instant devant eux, l'instant d'après à jamais perdue, avalée par son module.
L'Impérial Blanc s'assoit, le regard dans le vague, réfléchissant, probablement tout aussi anéanti. Restant longuement ainsi...
Plus rien ne bouge. Plus aucun bruit... Pas même les caméras contrôlées par Dreyer...
Dreyer.
Il tourne la tête vers le bureau proche, s'y dirigeant, instinctivement silencieusement, comme pour ne pas rompre la continuité de l'instant écoulé à jamais, mais comme encore, suspendu dans l'air.
Le grand écran est vide. Figé sur le statique, et le cyborg appelle, par l'entremise de son deck, la voix informatique déchirant comme un gond le silence :
« Dreyer ?... »
Pas de réponses.
Même l'IA a disparue.
Il s'approche, pianote sur l'écran, se connecte aux caméras avec son œil cybernétique, caméras dont il constate l'absence total de contrôle, et rembobine... Jusqu'à brusquement la voir, en surimpression virtuelle.
Elle passe juste à côté, depuis la salle qu'il a quittée... Pour se diriger vers le balcon.
Il "la suit" sans comprendre, passant la porte vitrée pourtant encore ouverte, lui-même émerveillé du réalisme de la surimpression directe captée par les caméras dernier cri.
Elle s'arrête devant la rambarde, profitant une dernière fois de l'air ensmogé, pluvieux, et la vue sur la basse-ville, en humant une dernière fois les odeurs, silencieusement, à l'écoute aussi.
Il la regarde, juste a côté, comprenant mais refusant encore de ressentir... Sachant qu'il n'a pas le droit de détourner le regard un seul instant. Il s'y refuse.
Il la regarde, toujours, l'œil fixe et douloureux, allumer avec son zippo Donnelys une cigarette, puis la fumer...
L'instant semble durer une éternité. Une éternité qui crie sa douloureuse sérénité. Une éternité qui lui poignarde le bide avec le pire sentiment qui l'ait jamais atteint, surtout en ce moment : l'impuissance.
Il n'est que spectateur. Spectateur de sa nuque qui rougit a un rythme imperceptible, spectateur de la tige qui diminue lentement à la cadence de son tirage.
Spectateur lorsqu'elle grimpe sur le rebord en métal, spectateur dont le corps se couvre de sueur alors qu'il n'y a plus rien a faire, devant l'effort qu'il fait de ne pas tendre le bras pour agripper le vide...
Spectateur lorsqu'elle tend les bras, comme si elle s'échauffait, s'étirant pour son dernier saut dans l'inconnu, s'étirant pour à la fois s'envoler et chuter, éternellement et à jamais.
Elle ferme les yeux.
Son corps chavire.
Disparaît dans un éclat de rire des plus purs.
Le dernier...
« Nnon... »
Gargouille-t'il faiblement, de sa propre voix cette fois-çi, déjà rauque de ne plus être usée, ne pouvant se retenir. Le dernier mot qu'il prononcera peut-être à jamais aussi.
Il la regarde chuter, sa silhouette se découpant dans les ténèbres un court instant, ses mains agrippés au rebord, avant qu'elle ne passe hors de portée des caméras... Mais son rire lui, cristallin, vrillant pourtant les tympans, continue quelques secondes, décroissant rapidement...
Ses mains se crispent avec force, phalanges organiques virant au blanc, les muscles bandés, tandis que le métal de la rambarde gémit plaintivement sous l'étreinte.
Il sent son cœur battre à tout rompre, alimentant une fournaise qui brûle en lui, comme si elle a toujours été là, tout du long, et n'en prenait conscience que maintenant.
Ses muscles, ses artères, sa tête, ses poumons brûlent, comme si son sang se changeait en lave, comme si une étoile de fureur naissait dans le Vide, comme si, lui-même, renaissait...
Il ne sent même pas une goutte acide s'écraser sur sa main organique, ou l'odeur alors qu'elle en grille un poil.
Un instant, son cœur semble sur le point d'éclater, ou l'artère de son plexus sur le point d'en sortir, jusqu'à ce qu'il ferme lentement l'œil, inspirant en lâchant avec difficulté la rambarde ne voulant pas délivrer ses mains enfoncées, qu'il lève finalement.
Lève, plus haut, encore plus haut, comme voulant toucher des doigts, ou implorer, quelque chose, là-haut, inspirant profondément, son torse, ses pectoraux se soulevant comme jamais...
Il reste ainsi un instant, avant de les baisser, à présent parfaitement calme. À part peut-être, une intensité retrouvée, dans le regard pourpre.
Il hume l'air pluvieux un instant, levant la tête, les tremblements de sa main organique décroissant aussi rapidement qu'ils furent intenses.
Tournant les talons, il retourne rejoindre l'Impérial Blanc, ne l'ayant quitté qu'à peine quelques cycles minutaires.
Mais qui le hanteront à jamais. Comme le son de son rire.
Spoiler (Afficher)
RP évidemment inutilisable a moins de circonstances spéciales IG !

Informations sur l'article

Une soirée qui sort de l'ordinaire.
20 Octobre 2016
1803√  21 6

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◊ Commentaires

  • DREYER~53827 (110☆) Le 20 Octobre 2016
    Merci pour ça, pour elle, pour tout ♥
  • Sigmar~2569 (176☆) Le 20 Octobre 2016
    Un moment de vie magnifiquement conté, merci pour cet écrit ☆ ♥
  • Kambei~7880 (255☆) Le 20 Octobre 2016
    Très agréable, dans le fond comme dans la forme. J'avais peur que ce soit un peu long mais finalement, on est portés par le flot!
  • DREYER~53827 (110☆) Le 21 Octobre 2016
    Parce quuuuuuuue !
  • KorSkarn (484☆) Le 22 Octobre 2016
    @Dryer C'est rien ♥
    @Sigmoule Et joué surtout !
    @Cambei J'arrive jamais a faire court^^ Merci !