EDC de Kaktuskonfus~46996

Les cicatrices sont la preuve que notre passé n'as pas été qu'un rêve.

Je vois une vaste plaine recouverte de brouillard, silencieuse mais marquée par le passé. Ce voile opaque m'empêche de voir ce qu'il y a en dessous mais cette impression de déjà vu me pousse à m'approcher. La traversée de la couche est pénible, aucun repère, que ce mélange gris sombre plutôt oppressant qui m'englobe. J'arrive enfin à percer l'obstacle, une brise légère découvre ce qui reste de vapeur à mes pieds pour me laisser découvrir l'objet de ma curiosité. La lumière peinant à traverser le brouillard, je suis plongé dans une obscurité intrigante. Je remarque que cette plaine est étrangement accidentée, on n'arrive pas à voir le sol mais ce qui le recouvre n'est pas net non plus. Des cratères creusent le seul un peu partout et le passé de cette vaste étendue se révèle peu à peu sous mes yeux. Ce qui jonche le sol est est un fait une multitude de carcasses d'androïdes et de cyborgs rouillées et rongées par le temps. Je suis surpris par la longueur d'une colonne vertébrale reliant ce qui reste d'un cerveau à un corps robotisé éventré.

Les androïdes, une fois détruits ne servent plus à rien, ils n'ont pas étés créés avec la notion de croyance, n'ont donc pas de rites funéraires ni de mère à faire pleurer. Alors c'est vrai hein, à quoi bon se charger avec eux? Laissons les sur le champs de bataille! Les bandits viendront se servir de matériaux et lâcheront nos convois pour un moment... Un ancien champs de bataille ressemble donc à ceci: un cimetière pour mécaniques en tout genres mais plutôt du type fosse commune. Cet espace oppressant est la preuve du peu d'importance que notre vie représente pour nos créateurs.
Mes senseurs captent tout à coup une faible empreinte vitale, à quelques pas. Je me précipite vers sa localisation mais rien, la trace n'est plus visible. Se pourrait-il que quelque chose ait survécut aux ravages du temps? Mon regard se pose sur un bras mécanique tendu vers moi, émergeant des profondeurs de ce Styx1'. On pourrait croire qu'il ne demande qu'à ce qu'on extirpe le reste de son corps mais je n'ose imaginer l'état dans lequel il doit se trouver. Une inscription retient cependant mon attention sur son doigt:TwinBot Prototype N° Bien sûr le numéro du prototype est effacé mais je commence à reconnaître la finition de l'articulation qui se dresse devant moi.

"13! Maintenant j'en suis sûr c'est bien toi!"

Sur ces mots les doigts se mettent à bouger difficilement, je m'empresse d'attraper la main et de le tirer hors de là. Son corps apparaît peu à peu m'enlevant de plus en plus le doute sur son identité, mais un léger grondement couvre la mélodie du vent, se faisant de plus en plus imposant. J'ai presque fini de tirer la carcasse de 13 quand le bruit sourd se fait accompagner au sol par un tremblement, lui aussi de plus en plus puissant. La carcasse de 13 peut à peine tenir sur ses articulations, pourtant je n'ai toujours aucun signal, aucun moyen de reprendre le contrôle sur ma moitié.
Mes capteurs thermiques relèvent subitement une augmentation continue de la température sur le champs de bataille, ignorant l'activité thermique du coin je décide de porter 13 jusqu'à un abris. Mais à peine ai-je enjambé trois androïdes que le sol commence à s'affaisser, nous entraînant plus profondément dans les enfers. La température atteint mon seuil de sécurité au delà duquel mes composants risquent de lâcher, tandis que tout autour de nous s'élèvent des volutes de fumée et des remontées de roche en fusion. Il me devient difficilement supportable de tenir 13 sur mes épaules maintenant, je me résout à le poser par terre. Nous continuons de nous enfoncer dans cet univers apocalyptique jusqu'à ce que la plateforme sur laquelle nous nous trouvons se fissure en son milieu, laissant le magma traverser l'épaisseur. Brutalement un geyser rougeoyant emporte la carcasse de 13. Les quelques gouttes qui m'atteignent font automatiquement fondre mon blindage, il m'est maintenant inutile de penser plus longuement à la survie de 13, même la mienne est largement remise en question.

Aucune porte de sortie, aucune chance de voir revenir mon autre enveloppe, l'espoir s'envole vite et mes calculs révèlent 99% de chances d'y rester, autant se jeter tout de suite dans le tumulte éblouissant. Tout mes composants fondent instantanément, vision coupée, écran noir, cependant je ressens toujours la même chaleur, et je perçoit comme un bruit d'alarme.

Une voix résonne dans ma tête:

"Drôlement résistant mon bonhomme! Ca fait combien de temps que tu te prends pour un marshmallow?"

Mes fonctions visuelles reviennent peu à peu et pourtant je ne vois personne. Je découvre une pièce plongée dans les flammes. Tout ça n'était donc qu'une projection? Le seul pourcentage de chances de survie calculé était de se réveiller de ce cauchemar?

"Si tu reste plus longtemps dans cette fournaise tes calculs risquent d'indiquer 100% de chances de te faire ramasser à la petite cuiller! Ressaisis-toi andouille!"

Quelle qu'elle soit cette voix a raison, je dois me sortir de cet endroit. J'ai tout de même le temps de remarquer que je me trouve dans l'Equilibrium. Me serais-je endormi pendant mon service? De toute façon je pense qu'à l'heure actuelle le patron doit s'en tamponner royalement! Un craquement me libère de mes pensées envahissantes et me fait remarquer une poutre incandescente en train de se déloger. Je n'ai pas le temps de l'esquiver et elle m'entraîne au sol dans une nuée de braises virevoltantes dans toute la pièce. Je me retrouve coincé sous cette immense torche qui commence à pénétrer mon blindage, impossible à repousser elle va bientôt atteindre mes composants vitaux.
Puis cette même voix recommence son petit jeux:

"Comment se sent notre cher 13bis à deux doigts de se faire percer son premier processeur?"

C'est impossible! En plus elle joue avec moi?

"Aujourd'hui est un jour sans!"

"Sans quoi?"

A peine ai-je eu le temps de poser cette questions qu'une explosion se fait entendre en arrière boutique. La déflagration est suffisamment puissante pour que le souffle expulse tout hors du bar, me délivrant de mon entrave par la même occasion. Mon salut n'est plus qu'à quelques mètres de là, une ouverture se démarquant des flammes par sa teinte bleu sombre. Le premier processeur est HS, mes articulations de jambes ne répondent plus, je dois me traîner par la force des bras jusqu'à cette sortie.

"Ca se traîne tout ça, un peu de nerf mollusque!"

Une deuxième explosion me fait cette fois glisser en direction de cette sortie. Mes composants ont difficilement put supporter ce deuxième souffle et ma vision est coupée brutalement.

"La boîte de conserve aurait-elle besoin d'un guide?"

Je me résout à faire confiance à cette voix,

"Ca m'arrangerait pas mal oui."

"Alors lève toi et marche!"

"Dois-je vous rappeler que je n'ai plus le contrôle sur mes jambes?"

"Ah oui... dans ce cas, retourne toi et rampe!"

A peine sortis du bar je peux entendre le plafond s'affaisser dans un craquement général, une vague de chaleur m'atteint et mes fonctions sensorielles reprennent peu à peu leur service. J'arrive à bricoler l'alimentation de mes jambes pour pouvoir me redresser et je commence à errer en direction du centre de cryogénisation.

Plus d'emploi, aucune trace de mes collègues, un bon petit séjour au frigo ne me fera pas de mal et en plus je n'aurait plus à supporter cette voix.

"Dit moi! Tu pourrais te montrer plus respectueux envers ton sauveur"

"Mais comment pouvez vous savoir ce que je pensais? Et d'abord qui êtes vous?"

"Ne t'en es tu pas encore rendu compte?"

"Je pense que si mais j'ai peur des conséquences"

"Et pourtant c'est la seule explication à peu près rationnelle."

Voila une autre séquelle de mon passé, la schizophrénie, il faut vraiment que je remette de l'ordre dans mes circuits si je ne veux pas finir en haut d'un gratte ciel au dessus du vide. Le diagnostic est dressé: mes composants sont en permanente dégénérescence et le seul moyen pour retarder ma mort est de refroidir régulièrement mon corps.