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Le Théâtre Mécanique - Acte II ; Le rêve de Sisyphe

Le Théâtre Mécanique
Acte II - Le rêve de Sisyphe [♬]

Les ruelles, sous couvert des lumières brisées, dégueulent leurs lot de passants habituel. Visage ballant, pas traînant, les éternels éphèbes errent à travers l'insondable smog du secteur rebelle. Les pas s’enchaînent, les corps défilent, une routine aussi nocturne que journalière persiste dans cette ville aussi crasseuse qu'aseptisée. Aseptisée de ses habitants, numérotés, ordonnés, et pourtant aussi abusés que parfaitement dressés. Travailler, puis se nourrir. Chier puis se faire plaisir. Cette cité l’exècre, les corpo aussi. Alors, la reine clocharde, dans son sarcophage de bandage, s'enracine comme un piquet fantôme, et en pleine foule, se laisse dériver à l'écoute. Peu à peu, elle sombre à travers ses pensées. On la bouscule sans délester d'excuses, chacun avançant comme une ombre, dépourvut d'un maigre regard à ce taulard qui négocie les faveurs d'une prostipute. Elle s'immerge, dans ses songes. On se dépêche, on s'heurtent même, jusqu'au t-cast, parce qu'il faut bien poser sa pèche au cycle convenue. Parce que la ville, c'est ça. C'est une affaire de cycles comptés dont l’horloge est cassée, où chacun s'hâte à cotiser pour de risibles histoires. Des histoires aux airs de racontars déjà racontées, déjà vécues, déjà oubliées, que l'anti-fidèle de Cyriel se plait pourtant à écouter. Silencieuse de ses lèvres martelées au shaker Skiwi'bloody, la crevarde faussement lépreuse se garde d'en commenter l'absurdité. Puis soudain, accouché entre deux passants, une gnoblarde au regard buriné la déloge de ses douces rêveries.

« HEY TOI !? Clochard vouloir credit ?! Alors clochard ça prendre ! »

Et comme un papier-cul après une diarrhée, un flyer lui colle désormais à la gueule. Mal-imprimé dans une cave paumée, un slogan bleuâtre mal-vomit se pavane sous ses billes d'acier : "Raflez ou Cuvez, mais soyez sans pitié !". Alors, elle décale, puis dérive. Elle aussi devient un sac anonyme, mais guère à foutre, qui officie à grossir un peu plus la foule blafarde. Ses pas remontent le courant, ses jambes s'éconduisent d'elles-mêmes, pour enfin se perdre jusqu'aux tréfonds miteux du secteur 0rion. Jusqu'à cette salle sordide d'un bâtiment délabré perdu parmi les commerces douteux du Dae'. Jusqu'à cette entrée ravagée, perdu on ne sait comment entre deux bennes à ordures n'ayant comme unique videur, qu'un orc pouvant vous réveiller un empereur en cryo, de son haleine fécale. Ou fétide. Allez savoir. Mais la clocharde au ventre creux n'en a cure, elle passe et dans son sillage, ne laisse entrevoir qu'une faim, celle de l'absurde. Alors elle entre, et se mêle à cet amas d'ersatz de société, drapés en porc et attroupés comme des bovins devant des cages d'aciers qu'on sait autant maculées d'écarlate que d'urine. Pour trois mille crédits, pas de déposition, et cinq rounds, on peut doubler sa mise. Alors elle mise.

« Un crédit. Ça suffira à passer le temps. »


Informations sur l'article

[Serveur de Stockage Public]
04 Janvier 2017
1483√  7 3

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