EDC de Helina

Je vais le revoir.

Je ne sais pas si c’est une bonne nouvelle.
Les messages jusque-là, me suffisaient. Il ne demeurait que des mots, des lettres sans intonation, sans présence à affronter, sans regard à soutenir.

Mais aujourd’hui, je vais le revoir.

Les souvenirs m’assaillent sur le chemin, si présents mais si flous, des sensations, la chaleur de son contact, des paroles, des sourires. Je ne veux plus de tout ça. C’est du passé. Cela ne redeviendra plus jamais comme avant.

Mon cœur cogne sur ma poitrine sur le chemin. Suis-je stressée, apeuré ou enthousiaste ? Je ne parviens pas à faire la différence. Je ne peux que subir les pulsations effrénées de mon cœur. Les épaules alourdies du passé que je ne peux plus supporter et que l’alcool parvient généralement à brouiller suffisamment pour que ne demeurent des brides décousues et dépourvues de sens.

Mais aujourd’hui, il n’y a pas d’alcool pour fuir.

J’aperçois son dos en premier lieu. Mon estomac se serre. Je ne me comprends pas. Toute cette situation est ma faute.
Contact visuel, sitôt évité. Salutations froides, à peine audible. Mal de crâne, tremblement. J’aimerai tant boire, mais je ne peux pas. L’arrivée d’une autre personne me sauve. Je me concentre sur elle. Je ne veux pas le regarder. Muscles tendus, anxiété. J’aurais préféré qu’il ne soit pas là.

Mais aujourd’hui, je ne peux reculer.

Tenue d’hôpital, table froide. Il est toujours dans mon champ de vision. Ses doigts effleurent ma peau. Contact électrisant, trop de souvenirs que je ne veux pas accepter mais que je dois subir. Anesthésiant dans mes veines, et les chiffres que je souffle m’emmènent dans l’inconscience. Dernier regard dans sa direction, discret, non assumé.

L’épreuve n’est pas terminée.

Réveil douloureux, bouche pateuse. C’est comme si un rat géant m’avait piétinée. Seule dans une chambre, besoin d’alcool. Besoin de vomir. Mouvements difficiles, j’arrache les patchs collés à ma peau. Mes jambes tremblent trop pour me lever. Gémissements de douleur, grognements de frustration.

Mais aujourd'hui, c’est lui qui vient à mon chevet.

La porte s’entrouvre. Sa silhouette se dessine derrière. Cœur qui bondit, migraine redoublant. Pourquoi lui, pourquoi maintenant ? Je suis faible, ridicule. Ce n’est pas l’idée que je veux donner. Il s’approche pourtant, une bassine à la main. Je ne veux toujours pas le regarder. J’ai honte. Il s’assied sur le lit. Trop proche. Quelques mots sortent de ma bouche. Quelques sujets sont évoqués. Je ne peux m’empêcher de me rabaisser. Qu’y puis-je ? Trop de choses m’accablent. J’aimerais perdre la mémoire. Refus de surmonter, une main posée sur mon épaule. Mes muscles se contractent. Je n’en veux pas. C’est trop tard. J’ai merdé. Ça ne sert à rien. Encouragements, sourire taquin. Je me surprends à sourire.

Aujourd'hui, je le revois comme avant.

Longue conversation, rapprochement. Son contact me détend. Nos regards se croisent enfin. Aucune fuite, chaleur au fond de moi. Je refuse d’y croire. Je refuse de me laisser aller. Mais c’est plus fort que moi. Étreinte familière, voix berceuse. Le sommeil me gagne, loin des cauchemars qui peuplent habituellement mes rêves.

Peut-être n’y a-t-il pas que des souvenirs douloureux ?

« T'es chiant, parfois, tu sais ? »
« C'est pour ça que tu m'aimes. »