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Aimer sa chute
Morne journée...
La veille au soir s'était tenue une cérémonie de remise de diplôme à l'Académie. Halinna avait pressenti que jamais elle n'aurait dû s'y rendre. Et pourtant elle était présente à cette funeste invitation. En fait de discours pour les lauréats, il n'y eut de l'Ambassadeur que d’amères paroles contre son action. Certes, elle n'était pas nommément critiquée, mais les mots étaient sans équivoques et les regards des Nobilis présents lourds de reproche. La jeune nobilis était restée impassible, les traits figés tout au long du réquisitoire. La diatribe du Lord terminée, les paroles de la Présidente du Conseil de la Noblesse ne furent guère plus amènes. S'en était trop, elle se leva, interrompit la Lady et prit congé non sans requérir un entretien. Tout cela pour avoir fait son devoir...
Et pourtant après ce camouflet nul souci d'elle et tous de se réunir en grand comité au chevet de l'orgueil blessé de l'Ambassadeur.
Et pourtant après ce camouflet nul souci d'elle et tous de se réunir en grand comité au chevet de l'orgueil blessé de l'Ambassadeur.
C'est pourquoi elle est là désormais, à l'entrée du Militarium. Elle ressert avec une lenteur mélancolique le chignon qui retient le flot auburn de sa chevelure. Soigneusement et avec une rigueur martiale, elle se coiffe de sa casquette impériale, vérifie l’ajustement de son uniforme de cérémonie puis franchit le seuil. Le hall est désert, à sa droite elle perçoit les rumeurs d’entraînements intensifs, mais d'un pas rapide et décidé c'est vers la gauche et la salle du sas qu'elle se dirige. D'une main, sans se retourner, lady Halinna s'appuie sur le rebord de celui-ci et le franchit prestement.
Elle ploie les genoux en se réceptionnant dans la fange des souterrains. La jeune femme attends quelques instants, le temps de s'habituer à l’obscurité et de découvrir enfin ces fameux souterrains. D'une main elle vient chercher à son flanc sa sulfateuse, canon au sol, cran d’arrêt retiré. Elle entame alors sa progression dans cet inconnu putride et malsain. Plusieurs fois elle se perd dans ces méandres malodorants, jamais le soucis d'un retour ne l'effleure cependant, et toujours la Nobilis avance. Le temps n'a aucune importance, elle avance, et chaque pas l'éloigne du Militarium, la rapprochant des rebelles. Minutes, cycles, elle l'ignore, ses bottes sont crottées par les immondices, la puanteur atroce a fini par lui ôter l'odorat, lorsque au détour d'un autre conduit elle découvre une échelle, le sas rebelle. Un sourire se dessine sur ses lèvres, mais un doute le chasse presque aussitôt. Elle veut monter, mais lois et règlements la retienne et la Déléguée Impériale les incarne encore pour quelques cycles. Si elle ne peut hacker le sas rebelle, elle fera autrement. Quelques restes non-identifiés gisent là, en contrebas, elle se saisit de l'un d'eux puis le projette avec fracas tout contre le sas rebelle. Le vacarme se répercute à l'infini à travers les souterrains, mais rien... ...pas l'ombre d'un rebelle.
De guerre lasse la Nobilis s'en retourne donc d'un pas lent s'attardant sur le moindre détail. Du bout des doigts elle parcourt les gravures impériales et rebelles qui ornent la paroi d'une salle sinistre.
Un bruit...
Un frisson lui parcourt l'échine, elle se retourne. Un homme, ou plutôt un androïde, il la dévisage. Le cristal de son armure luit d'un éclat glauque dans la lumière verdâtre des égouts, remontées sur le front des lunettes de vision nocturne et entre les mains le sourd ronronnement d'un lance-flamme. Ils s'observent, elle dans sa tenue de cérémonie, lui dans sa combinaison de combat, le silence dure ainsi une seconde ? Une minute ? Les armes restent pointées au sol, les mains crispées sur leur métal froid.
Le silence se rompt, « Qui êtes vous ? », « Vous êtes ? » les interrogations se croisent, les regards aussi, lui goguenard, elle impassible. Un nouveau silence, court, et lui de reprendre. Il se présente comme un « fier rebelle ». Un sourire presque imperceptible se dessine sur les lèvres de la Nobilis. Après avoir vainement chercher l'ombre d'un rebelle à travers les souterrains putrides voilà que l'un d'eux se présente à elle à l'instant où elle renonçait. Elle va mourir, enfin, elle n'a aucun doute, elle en est même satisfaite. Il n'y a pas de plus belle mort que celle de tomber au combat pour l'Empereur, ce romantisme l'appelle. La Déléguée Impériale ordonne à l’androïde de jeter son arme et de se rendre, il écarte ce commandement d'un nouveau rire. Il lève son arme, elle retire le cran de sûreté de la sienne...
Une langue de feu s'échappe du canon de son adversaire, en une crispation elle presse la gâchette de sa sulfateuse. Elle ressent les trois nettes secousses de la rafale dans ses bras, mais à cet instant c'est la flamme qui l’obsède. La langue de feu devient un torrent brûlant qui l'enveloppe, l'aveugle. Elle est morte, c’est certain.
Et cependant le tourbillon incandescent se dissipe, son adversaire est toujours là, elle aussi. Elle est grièvement blessée mais ne ressent aucune douleur, adrénaline. Elle cesse de réfléchir, elle se bat. Déjà son adversaire essaye à nouveau de l'incinérer, elle se jette sur le coté, vise, lâche une nouvelle rafale et touche. La danse mortelle se poursuit ainsi une courte éternité. La jeune femme trompe les flammes avec une souplesse et une agilité dont elle ignorait être capable cependant que rafale après rafale elle perce l'armure de son adversaire. Le rebelle peste, donne un coup sur son arme échappant un nouveau jet de flamme, son harnachement le ralentit, il ne parvient pas à toucher la Nobilis et subit davantage qu'il n'inflige. Paniqué, il jette un regard en direction du sas rebelle puis se décide à courir. La faiblesse change de camp, devenue prédatrice la Déléguée Impériale se lance à sa poursuite, elle le rattrape. L'androïde n'a pas le temps d'activer une nouvelle fois son arme qu'une dernière rafale de sulfateuse le fauche, il tombe.
Elle le regarde choir, son sourire s'efface, elle réalise que ce n'est pas elle qui ira flirter avec la mort. Son visage se fige à nouveau en un masque d'impassibilité, elle s'avance d'un pas lent vers son adversaire. Le canon rougi de sa sulfateuse pointé sur la tête du rebelle.
_ Un dernier mot ?
Un gargouillis sanglant lui répond, l'hérétique penche la tête sur le coté crachotant puis se redresse à peine.
_ Vive la liberté.
_ Que l'Empereur vous pardonne.
_ Que l'Empereur vous pardonne.
Elle regarde une dernière fois le visage ensanglanté de celui qui aurait dû être son meurtrier puis appuie sur la gâchette. L'écho du coup de grâce semble tonner terriblement à travers les souterrains.
L'adrénaline du combat bloque encore la douleur et pourtant elle est grièvement blessée, si la mort ne la veut pas ici, peut être ailleurs, elle s'en retourne alors vers le sas du Militarium. Dans quelques cycles elle connaîtra, elle aussi, le repos de la mort.
L'adrénaline du combat bloque encore la douleur et pourtant elle est grièvement blessée, si la mort ne la veut pas ici, peut être ailleurs, elle s'en retourne alors vers le sas du Militarium. Dans quelques cycles elle connaîtra, elle aussi, le repos de la mort.
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20 Octobre 2012
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