EDC de Ethayel~30165

Vingtième cycle horaire.
Ethayel revient à son domicile. Elle s'appuie sur la porte refermée, regard posé sur le sol, inexpressif. Après quelques pas la voilà dans son humble séjour.
Elle retire son haut de tailleur, le jetant sur le divan non loin, un dossier accompagnant l'habit dans son court voyage. L’Ordonnance arrive dans la salle d’eau en chemisier blanc. Silence rompu par le son d’une chute de goutte. S’approchant de sa douche, elle allume l’eau jusqu’à sentir la vapeur sur son visage, fermant un instant les yeux.
Ses vêtements tombent un à un au sol. Le froid de la cité la rappelle à la réalité, par un courant d’air inattendu, faisant frissonner son corps nu. Ses mains glissent sur ses avant-bras, elle s’avance d’un pas, la chaleur de l’eau la touchant enfin.
Immobile, les yeux clos, elle attend. Sous le flot continu elle retient sa respiration, son corps dénudé est libre, l’étreinte de ses fonctions disparaît l’espace d’un instant.

Qui est-elle vraiment ? Une jeune femme ? Un Sergent militaire ? Les deux à la fois ? Elle l’ignore, autant que son sourire peut parfois lui aussi mentir. Nombre d’éloges reçus sur son sourire qui pourtant n’est pas forcé. Parfois, il est un masque, cachant les méandres de ses maux. Ce masque est fragile, souvent atone si la personne arrive à plonger son regard suffisamment loin dans le reflet de son âme. Il y en a une qui semble y parvenir, souvent, trop souvent même. Cela devient gênant, mais si vivifiant. C’est à ce moment qu’elle est en vie, qu’elle sent son cœur battre, emprisonné dans sa cage.
Les minutes défilent, elle laisse aller sa tête en arrière, l’eau chaude coulant maintenant le long de son corps, épousant sa peau avec ivresse. Un long soupir froisse la monotonie de ce cycle aquatique.
Léger effort de mouvement : elle ressort.

Son regard croise celui du miroir, elle s’y attarde. Elle est là, nue devant elle-même, s’observant avec prudence. Elle remonte ses bras, cachant sa petite poitrine, agrippant ses épaules de ses doigts : A-t-elle honte de son corps ? Non, elle a peur, peur d’elle-même. Elle se regarde, fixement, dans un silence déconcertant, l’écoulement étant désormais bien loin de son sens. Mince, féminine malgré sa fonction, elle voit cette eau réconfortante d’il y a quelques instants se transformer en source de froid, le ruissellement des gouttes perpétue sa descente au milieu des frissons de son enveloppe charnelle.
Un clignement de cils vient arrêter cette éternité, puis un nouveau soupir.
Que signifie-t-il ? Ethayel avait un souhait, enfoui six pieds sous son monde. Elle s’approche de la buée récemment formée sur son reflet, pose sa main sur cette image d’elle-même maintenant troublée et semble y écrire un prénom, qu’elle efface ensuite d’un geste. La jeune femme se retrouve à nouveau face à elle-même. Elle secoue la tête.
S’enroulant dans une étendue de tissu, elle se retourne et quitte la pièce… pensant à l’amour qu'elle souhaite.

Vingt-et-unième cycle horaire.
Communication avec son Organisation. La femme laisse place à l’Ordonnance, une nouvelle fois.
Tristes pensées que le retour à la réalité oblige.