EDC de Electron~41435

Faut que je sache. Dans quelle merde je me suis fichu. Ce que je fais dans un bar vide, à somnoler sur un canapé usé, rouillé au sens propre comme au figuré. Avec un rouage grippé dans la tête, et un disque rayé qui tourne en boucle dans un crissement assourdissant... J'ai la sale impression de vouloir me souvenir, seulement voilà. Je ne me souviens pas.

La seule chose dont je me rappelle, c'est cette sensation de m'être pris un coup de batte de dreadball derrière le crâne. Le genre de réveil douloureux, c'est rien de le dire...
Bouger un bras, l'autre. une jambe, l'autre. Première bonne nouvelle, je suis entier et en vie. Encore cette impression étrange, qui me dit que ce n'était pas acquis, sans que je ne sache pourquoi.

Ouvre les yeux, cyborg. T'es un homme, merde !
Mon regard se pose sur une infirmerie vide, sommaire... Et toujours rien qui ne me dise quoi que ce soit.

Quelques minutes passent, s'égrènent, s'étirent sans que je ne tente de les retenir. Je cherche en moi une mémoire qui refuse obstinément de montrer le bout de son nez, les yeux clos, la respiration lente.
Introspection.
Recherche.
Noir. Noir. Noir.

Je me lève dans un mouvement d'agacement, vacille, et m'étale sur le lit voisin.

- Bordel...

Le son de ma propre voix me surprend... Bien plus rauque que je ne l'imaginais.
N'empêche, j'aurais rêvé mieux, comme sortie de coma.

Dans un sac manifestement déposé pour moi, je trouve une chemise propre, un poing américain et une carte. Sur le coup, je me marre. Ça fait très "pack bidas". Ça me fait moins rire quand je comprends que cette besace, c'est dorénavant toute ma vie.
Pas de repère dans le présent, pas de souvenir du passé... Ça me fiche quand même un coup, pour tout dire.

Heureusement, "on" avait eu la bonne idée de me laisser autour du cou une petite plaque en métal, vaguement militaire. Un petit rectangle aux bords usés, griffé par le temps.

Au moins, j'ai un nom ! Suspens.... J'attrape fébrilement le seul vestige de ce qu'a pu être ma vie, et.... Electron.
Electron ? Sérieusement ?!
... Tu parles d'un nom à la con ! Même pour un cyborg, ça craint.
Du coup, je me rassure en me disant que ça devait être un surnom.

*****

Je finis par sortir et errer dans les rues vides, en chemise flambant neuve, pantalon troué et pied nu, pour glaner quelques infos. Me faut une carte d'identité. J'en ai retiré une.
Me faut un job. Je suis momentanément au chômage.
Une bonne âme me conseille de me loger, paraîtrait qu'il ne fait pas bon dormir dehors par les temps qui courent... Pas le loisir de discuter plus qu'il disparaît entre deux bâtiments, m'abandonnant avec mes questions et mon amnésie. Bon, tant pis.
Dans le doute, je fais une demande de logement "social", et me repose quelques heures dans un hall à défaut d'un lit correct...
Pas de rêves, pas de cauchemars. Du rien. Du vide parsemé de quelques murmures moqueurs... * Electron... Tu parles d'un nom ! *

Au réveil, je pars m'acheter un sandwich et un soda.
C'est étrange de retrouver des automatismes de survie alors qu'on ne se souvient pas de sa propre existence...

Bref. Je me colle dans un coin du bar, grignote ma pitance et en profite pour regarder pourquoi mon coude se bloque systématiquement quand je le bouge... Je crois que c'est un soucis de réglages, mais sans outils, je ne vais pas pouvoir y faire grand-chose. Saloperie de technologie obsolète !
En somme, faut que je trouve une personne pour me réparer ça... Hum. On va faire ça.

... Et j'en profiterai pour lui demander dans quel bazar je me suis encore fourré. Parce qu'il faut que je sache.