EDC de Chlore~74577

Ses premiers pas dans la ville avaient été bien plus chaleureux que son réveil, bien que la météo ne l’avait pas épargnée. Le temps était gris, maussade, comme certains bâtiments devant lesquels elle était passée, et la pluie qui détrempait les vêtements jetables de son arrivée n’arrangeaient rien. Elle avait froid, encore. Mais les messages d’accueil qu’elle avait reçus quelques minutes auparavant lui réchauffaient le cœur, au moins.

Et heureusement qu’elle les avait reçus, d’ailleurs : hors de l’hôpital, les rues lui paraissaient complètement désertes, comme abandonnées, laissées à leur propre sort. Certaines enseignes de boutiques brillaient difficilement à travers le smog, signalant tant bien que mal qu’elles étaient ouvertes et prêtes à recevoir les clients, mais pendant un instant, Chlore ne put s’empêcher de penser qu’elle était – presque – seule au monde.

Au final, trouver ce qu’elle allait faire – pour l’instant – était simple : suivre les conseils du Centre d’Accueil, et aller chercher un job. Ce fut chose aisée. Elle se rendit au CIPE, ne se laissa pas intimider par la taille de la bâtisse, alla consulter une borne, ne se laissa pas non plus intimider par le nombre d’annonces, et prit le premier travail sans candidature qu’elle trouva. Enfin, presque… Les notes de piano, nouvelle mélodie mais même instrument, l’avaient déconcentrée pendant sa recherche, et elle passa une dizaine de minutes plantée devant la borne comme un arbre prenant racine.

Elle secoua la tête, si fort qu’elle aurait pu éjecter les touches de cet invisible piano, bien que tout ce qui se passa, c’est que ça renforça la migraine de son réveil. Dans un léger grognement, elle passa sa main gauche sur son front, l’autre occupée à pianoter la borne. Elle finit par trouver un poste qui payait plutôt bien, pour un début, et le prit sans hésitation. Cryptovendeuse, dans une usine nommée La Crypte. Elle ne saurait pas vendre beaucoup plus qu’un sourire nerveux, mais pour le moment, ça ferait l’affaire.

Une heure était passée, si ce n’est deux, voire trois… Elle n’en avait aucune idée : les premières furent passer à travailler – enfin, à détailler chaque mur de l’usine – avant qu’elle n’aille rencontrer l’une des dames du CA. Chlore passa une autre heure en sa compagnie, écoutant attentivement l’Elfe ainsi que chaque conseil que celle-ci lui donnait. Il y en avait des choses à connaître sur cette ville… Mais la bienveillance que l’Elfe mettait dans chacune de ses explications et les discrets sourires qui éclairaient son visage fatigué rassura la jeune cyborg : elle ne serait pas aussi seule que ce que ce difficile réveil lui avait fait croire. Loin de là.

Par com’, Chlore avait rapidement fait la connaissance de son patron actuel, et avait pu en apprendre un peu plus sur l’entreprise dans laquelle elle était. Et elle s’était à nouveau rendu compte qu’elle aurait besoin de temps pour comprendre le monde qui l’entourait, au moins dans les grandes lignes. Néanmoins, là, tout de suite, elle avait grand besoin d’une sieste. Après un énième merci adressé à l’Elfe, elle fila aux dortoirs, et s’endormit sans tarder.

Son second réveil fut bien moins chaotique que le premier : le lit du dortoir était bien plus confortable que la cuve de laquelle elle était sortie. Ça tapait toujours, à l’intérieur de son crâne, et le piano commençait à l’emmerder, mais elle se sentait quand même mieux. Il était grand temps qu’elle se mette à explorer, désormais. Et ni une, ni deux, elle se remit sur ses jambes, et repartit parmi le smog.

Sans les quêtes du CA pour lui donner une idée de ce qu’elle devait faire, et sans la carte du secteur pour la guider, Chlore n’aurait pas été bien loin… Surtout en ayant réussi à se perdre quand même. Malgré tout, ça y est, elle était en bonne voie : en une journée de vie, elle avait rencontré tout un tas de personnes prêtes à l’aider, avait trouvé un emploi et un logement, et avait commencé à nouer des liens… En bousculant les gens, deux fois de suite. Ce n’était pas très conventionnel, mais elle s’en fichait.

Elle n’était pas seule.