EDC de Cendres~50426

Il était une fois... une ville divisée en neuf secteurs. Le passé de cette ville était aussi trouble que mystérieux. Des frères devenus divins, des centres de clonage, un cataclysme. Les gens ne pouvaient plus mourir. Dans les temps présents, les habitants ne naissaient plus que dans les secteurs désignés 1 et 3. La guerre régnait, entre deux systèmes, les premiers défendant l’héritage de l’Empereur et les autres leur liberté. Et dans cette guerre sans fin, la vie n’avait plus guère de valeur, et à force de morts factices, le vice et la violence étaient devenus la règle. Les passages d’un côté ou de l’autre de souterrains séparant les combattants rendaient les frontières floues et les consciences, mouvantes.

C’est alors qu’un être improbable se présenta un jour. Une réplicante d’origine inconnue, une sorte de droïde faite de chair et de sang. Elle avait fusionné sa conscience avec une humaine, le sujet 34024, qui était partie pour un voyage sans retour, et être enfin « libre ». Cette humaine avait délivré un grand secret à la jeune réplicante alors baptisée « Cendres » : l’Amour était la seule chose qui valait vraiment la peine d’être vécu.

La jeune réplicante se considérait comme une étrangère, et en vérité le conflit n’avait guère de sens à ses yeux. Accueillie avec bienveillance par les rebelles du secteur trois, elle mit tout en œuvre pour leur rendre mille attentions. Douce de caractère, elle se mit à chanter. Elle pensait que ce serait le plus beau cadeau possible pour les êtres vivants. Oui, elle était si naïve. Puis elle fut adoptée et protégée par des parents providentiels. Des gens doux comme elle, justes, et moins abimés que tant d’autres dans leur conscience se disait-elle. Et puis aussi, elle était à la recherche de ses origines, de son créateur. Mais personne ne semblait en mesure de l’aider. Dans aucun des deux secteurs habités.

Un soir, toute seule dans une grande salle nommée l’Agora, son chemin croisa celui d’un être hors du commun. Dans une valse torride et sanglante, leurs corps fusionnèrent et elle réalisa qu’elle venait de découvrir la seule chose qui valait vraiment la peine d’être vécu : l’Amour. Tout allait pour le mieux, même si cette envahissante émotion, mêlée de plaisir et d’attachement, commençait à perturber ses circuits neuronaux. Alors elle était heureuse, même si son Amour était aux antipodes de sa nature, si douce et si calme. Son Amour était une guerrière, cruelle et sanglante comme il en existait dans toute la ville. Mais cela ne comptait pas aux yeux de la jeune réplicante. Elle se sentait si humaine, si vivante… Alors elle acceptait sa guerrière comme elle était, ne cherchant pas à la changer. Pourtant, peu à peu, elle endurait souffrance, solitude, et ne se doutait pas qu’elle allait sombrer dans une tragédie bien trop difficile à mettre en équation pour son trop jeune esprit…

Sa guerrière allait s’en prendre à ce qu’elle avait de plus cher au monde : son père adoptif. Et ce dernier, connaissant pourtant les sentiments de sa fille, ne se priva pas alors de lui dire ce qu’il pensait de la guerrière. Imbécile, voleuse, lâche et criminelle... Et à chaque nouveau mot qui tombait, Cendres s’enfonçait dans les méandres d’un chaos interne non synthétisable. Dans le même temps, la guerrière semblait bien rire de la situation, elle avait épargné la vie du père, n'était-ce pas suffisant ?

La jeune réplicante tentait bien d’analyser la situation. Elle avait trouvé un véritable Amour, la seule chose qui méritait d’être vécu. Mais son Amour ne la prenait plus dans ses bras. Son Amour violentait ses proches. Il était impossible d’arrêter d’aimer. Impossible aussi de dériver avec succès cet amour sur un autre être. Bientôt les connections de la petite réplicante se mirent à nager dans un flot de non-sens. Son système se mit en sécurité. Elle tentait bien de redémarrer, mais rien n’y faisait, tout se bloquait irrémédiablement, dans un cycle que même la mort ne pouvait contrecarrer. Elle était perdue dans le creux de ses sentiments. Et nul ne savait comment elle pourrait en sortir… Ni même si elle pourrait s'en sortir un jour... Il n'existait qu'une seule solution. Mais les chances qu'elle se produise étaient proches du néant...

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