EDC de Callian~48825
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Rapporteuse
L'attente fut implacable, cette désagréable impression de tourner en rond m'accompagnant chaque cycle. J'allais enfin savoir la totalité de l'histoire, avoir la primeur de la lecture. Comme si j'étais une sorte de voyeuse... Des événements qui me concernaient de loin ou peut-être de trop près justement. C'était le coup de dague final dans le trou sans fond de cette blessure qui ne guérirait jamais. Je la croyais inerte, mais le mal ressenti était encore bien là, tapis, à l'affût des premiers mots dévoilés.
Voyeuse... Rapporteuse. Beaucoup d'étiquettes. Il me fallait comprendre et analyser avec distance pour mieux retranscrire. J'ai pris de la hauteur, un détachement surjoué, dans mon canapé, avec ma tablette déjà tremblante entre les mains. À moins que ce ne soit mes mains qui tremblaient... Je refusais d'abord la plongée dans l'horreur, renâclant à me prendre au jeu des sentiments vécus par procuration. Il faut souligner que je ne vis plus beaucoup de sentiments. Voire rien. Une sorte de néant originel cérébral, renforcé par des entraînements plus qu'intensifs, des conversations restreintes ou seulement par l'intermédiaire de mon communicateur. L'autisme endeuillé, bravo moi. J'ai la vague impression d'être comme ces contrées désertes et ruinées que le rapport décrit. Je me dis un instant que c'est parfait, qu'après tout, j'ai atteint le détachement nécessaire pour ne plus être atteinte. Par rien. Ni par l'horreur, ni par la mort, ni par toi. Surtout pas par toi. Mes yeux continuent à condescendre à cette lecture détachée. Jusqu'à la première mention... Des lettres, qui finissent par former une identité. Ton nom. Qui résonne en moi comme un cataclysme, un retour à un an en arrière. Je refuse, je ne veux pas, je tente de me débattre mais voilà bientôt le néant habité par une foule de sentiments contradictoires, repeuplement sauvage d'une âme abandonnée.
J'en suis à envisager la fuite. Pourquoi m'avoir demandé ce résumé, à moi hein ? Certes, c'est mon job mais quand même, c'est inhumain de me l'imposer non ? Je devrais refuser, appuyer sur supprimer, arrêter là la violation de la sépulture des braves. Mais mes yeux sont aimantés, ils traquent ton nom sans relâche, ma gorge se serre, mon souffle s'accélère, c'est pire qu'un testament abandonné. Le deuil se prend les pieds dans le tapis criard du retour en arrière, il essaye de murmurer son mécontentement, fronce le sourcil l'air de dire que ça suffit, c'est trop cette fois, on ne peut surnager, se trouver en passe de sortir du marasme infernal pour y replonger de nouveau et s'y noyer définitivement. Pas après tous les efforts, pas après les conversations et les pleurs. Le deuil est mécontent et il a bien raison.
Sur le coup, j'en veux farouchement à mon employeur, parce que c'est beaucoup plus facile de le blâmer lui que de blâmer ma propre nature indomptable de grande mélancolique. Où est donc le pragmatisme fier de l'elfe libre, si souvent affiché et assumé ? Je suis risible, ridicule. Tu dois te retourner dans ta tombe ou dans l'estomac de cet insectoïde. Même si depuis le temps, tu l'as quitté ce foutu estomac.
Je me mets au travail, très mécaniquement, sondant les possibilités de l'écriture automatique. Mais bizarrement, si je ne me concentre pas sur ce que j'écris, les mots n'ont pas grand sens. J'efface tout, je recommence. L'écran, pas ma vie, même si parfois, j'aimerais... Je tape alors, j'emploie le langage que je veux procédural, comme si je parlais d'un fait divers de notre secteur : hier au soin, X a découpé en fines lamelles un écureuil vociférant sa douleur en pleine rue. Personne n'est venu à l'aide de la pauvre victime. Voilà, ce genre de langage désincarné. Quand j'arrive à devoir signaler ton décès, mes mains dansent une polka de mort-vivants sur le clavier, je ne sais si je vais pouvoir l'écrire, le graver sur l'EM pour que d'autres lisent ensuite. J'écris, perdue... Décès #5 : Callian... Je scrute l'écran de mon deck un instant, clignant des yeux, avant de comprendre que quelque chose ne va pas. Acte manqué. Je corrige.
Je me mets au travail, très mécaniquement, sondant les possibilités de l'écriture automatique. Mais bizarrement, si je ne me concentre pas sur ce que j'écris, les mots n'ont pas grand sens. J'efface tout, je recommence. L'écran, pas ma vie, même si parfois, j'aimerais... Je tape alors, j'emploie le langage que je veux procédural, comme si je parlais d'un fait divers de notre secteur : hier au soin, X a découpé en fines lamelles un écureuil vociférant sa douleur en pleine rue. Personne n'est venu à l'aide de la pauvre victime. Voilà, ce genre de langage désincarné. Quand j'arrive à devoir signaler ton décès, mes mains dansent une polka de mort-vivants sur le clavier, je ne sais si je vais pouvoir l'écrire, le graver sur l'EM pour que d'autres lisent ensuite. J'écris, perdue... Décès #5 : Callian... Je scrute l'écran de mon deck un instant, clignant des yeux, avant de comprendre que quelque chose ne va pas. Acte manqué. Je corrige.
Décès #5 : Sodom
Un chiffre comme un autre. Je continue à taper, presque frénétiquement à présent, pour me débarrasser de ce qui devient une torture. Je sais pourquoi j'ai accepté cette foutue expédition, je le sais à présent. Je le sais tant que ça me fait froid dans le dos. J'y vais pour déterrer des cadavres, j'y vais avec un espoir de folle furieuse, le dernier. Histoire de croire encore que le lien n'est pas mort. Que rien n'est fini, que tout commence. Je soupire et mon soupir se répercute dans la pièce vide. J'y vais pour réapprendre à vivre, enfin. Pour toucher du doigt l'horreur qui t'a arraché à moi afin que me soit rendue ma force. Étrange de croire que cette contrée hostile, qui n'a fait qu'ôter les esprits à des gens bien plus farouches et armés mentalement que moi, va compléter un pan de mon tableau fracassé.
Je relis mon texte, la colère n'est plus là, la tristesse non plus. La neutralité, je la cherche encore. Et puis je penche la tête et je souris : au milieu de l'horreur, je vois les sacrifices. Le tien bien entendu, mais celui des autres aussi. C'est dans les moments les plus monstrueux que les âmes s'illustrent et révèlent leurs fibres les plus secrètes. C'est quand tout est perdu que le groupe s'unit, se soude afin de ne faire plus qu'un face au danger. L'unité rêvée, l'unité chérie. Faut-il que nous soyons poussés dans nos retranchements les plus ultimes pour que nous puissions l'embrasser ? Je veux pourtant croire que si les mécanismes se réveillent dans les cas extrêmes, c'est qu'ils nous suffit de peu pour les faire jouer à loisir, afin de faire front contre n'importe qui ou n'importe quoi. Encore faut-il trouver le déclencheur, la bonne émulation. C'est cette quête que j'entreprends en songeant à cette nouvelle expédition qui se profile. Ça et l'autre quête que je ne peux révéler...
J'ai moi aussi des choses à trouver dehors.
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Héritage
25 Avril 2014
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