EDC de Alinka~5723

- Le début d'une réalité -

La curiosité malgré tous ses attraits, coûte souvent bien des regrets.

"Combien de vies ? Combien d'identités ? Combien d'expériences ? À quelle fin ? Même moi, je ne sais plus.... Tout ce que j'appréhende, ce que je suis allée bien trop loin.... "

La jeune crêteuse se trouvait en rude désolation, elle préférait sans nul doute se trouver à mille lieues de là, non loin du calme et de la paix intérieure plutôt que dans cette cuve sombre baignée d'angoisse, où le tourment la ronge.
Dans un soupir aussi lourd que le poids pesant sur sa conscience, elle se libèra d'un geste de main de la poche amniotique qui l’enveloppait, dévoilant sa peau blanche comme la neige fraîchement déposée où nulle ride n'y trouverait sa place, juste des trainées d'encre et de cicatrice. Son âge, dans la moyenne, déterminant sa chair, finement musclé, douce et tendre.
Ses yeux, demeurant obstinément clos, laissaient place au recueil de son esprit, à la recherche de son identité.

" Alinka... Alina... Shepard... Vakarian ? Empire... Noblesse... Requiem... Rebelle.... Mais qu'est-ce que je suis censée foutre ici.. ? Et merde, pourquoi maintenant ?"

À la recherche d'une identité, utopique conquête de soi-même, elle s'étonnait de pouvoir ouvrir ses paupières sans avoir pu mener sa réflexion à terme. Acte qui eut l'avantage de l'extirper de ses pensées vers de nouvelles réflexions et sensations. Sa peau frétillante sous la fraîcheur de sa cuve de cryogénisation, de la lumière aveuglante vint rapidement embuer ses sanglants iris.
C'est dans un élan de survie qu'elle se redressa d'un bon, quittant sa cuve, apposant rapidement une main sur sa tempe douloureuse, vivement rattrapée par ses songes.
Ne comprenant pas pourquoi cette crise d'identité ne prenait effet que maintenant alors qu'elle possédait sa propre façon de penser, d'avancer et de se démarquer, la voilà prisonnière de ses racines auxquelles elle ne cesse de s'identifier. Une engeance pour certain, une bénédiction pour d'autre, tout la reliait à son arrivée dans les murs de la cité.

"Cela faisait parti de mon plan... ? .... Mais quel plan putain..."

S'en suivirent des jours où les rêves dominaient son existence, à chaque réveil, celle-ci se retrouvait bercée par de nouvelles informations, sur son passé, sur elle, sur ce qu'elle était et ce qu'elle avait prévu de faire. Que de bouleversements, l'envahissant à chaque déconnexion de son cerveau dans cette phase que l'on nomme "sommeil" et tout ça, simplement à l'aide d'une puce logée dans son cervelet dont elle ignorait jusqu'ici l’existence.

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Plus les semaines passaient, et plus elle se montrait distante envers sa moitié, ses connaissances et même son devoir, se retrouvant peu à peu dans ses songes. Une mentalité qui ne lui ressemblait guère, ou du moins qui se rapprochait de son passé, un changement dur à déceler au vu de son attitude de belle au bois dormant, mais le grand jour arrivait, avançant à grand pas.

Son esprit s'affaiblissait, laissant place à sa version originale. Alinka, huit ans qu'elle attendait ce moment, un plan bien à elle qui, pour réussir, se devait de n'être connu que par elle. Un poids qu'elle n'eut même pas à supporter, cette charge dévolue à son ersatz qui ignorait jusqu’alors cette partie de son passé. Ce dernier étant volontairement modifié, pour une mentalité plus ouverte, plus rebelle, sang chaud avec une once de puérilité. Un choix des plus stratégiques pour changer de vie, de contacts et de comportement sans évoquer le moindre soupçon, dans un mélange ou même la torture n'arriverait à la faire parler, Alina.
Cependant, il lui était impossible de revenir en arrière, le passé reprend sa place pour mieux la changer. Comment se regarder en face quand cette réalité nous rattrape et qu'un duel d’individualités fait rage ?

Alors que la crêteuse sirotait un café, au milieu de ses songes, un message apparu, d'un destinataire bien connu, bien plus que son ami, aussi fidèle qu'un bon mari, Paul Sernine. Loin d'être anodin, la vidéo eut un impact aussi puissant qu'une grosse gifle qu'on ne voit pas venir, à un tel point que son café se renversa au sol et le flash back commença :

Elle se voyait, elle, ou plutôt Alinka esquissant plusieurs plans sur sa tablette graphique, négociant avec le responsable du centre de clonage, sa noblesse du moment favorisant l'échange entre ces deux là. C'est là qu'elle pu se voir, elle même, d'un œil extérieur, allongée là, inerte, dans une cuve. Alinka la dévisageait, affirmant qu'il fallait plus de tatouages et de piercings sur ce nouveau clone. Une scène qu'elle n'avait jusqu'ici jamais eut l'opportunité de voir, sans parler de ce qu'elle entendait, l'ajout d'une puce dans son cerveau, prête à réagir 8 ans plus tard, emmagasinant au passage toutes les données que ses iris allaient percevoir.

C'était donc ça, son plan ? Jouer une nouvelle identité dont le seul but sera de récolter des informations pour l'empire ? Même si sa mentalité changeait de nuit en nuit, la nouvelle n'en restait pas moins quelque peu troublante.

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Deux mois plus tard, le programme visant un retour aux sources battait son plein, plus rien ne pouvait faire revenir Alina, sa mémoire quasiment effacée était belle et bien remplacée par celle de l'ancienne noble, l'origine de son existence.
Ce fut le soir du mensonge, de la ruse, le début d'une réalité si longtemps voilée. Celle-ci prétexta un entrainement auprès de sa compagne, précieuse source d'informations sur pattes. Le début d'une lourde exécution commença, ses coups, en apparence délicats et dans le seul but de s'améliorer, dérapèrent bien vite en une rafale surprise. En effet, ses gants hydro pendouillant à sa ceinture rejoignirent rapidement ses mains, sans un mot, le tout avec une extrême rapidité, ayant pour simple but de mettre la mutante à terre. Une fois chose faite, elle s'approcha de l'être qu'elle prit soin d'aimer pendant ces 8 longues années et s'abaissa à son niveau, la dévisageant d'un regard des plus neutres.

"Navrée."

Souffle-t-elle froidement avant de poser le bout de son neuf millimètre en face de la greffe oculaire de la semi-gnoll, légèrement de biais afin d'éviter toute zone vitale et de tirer sans une once d'hésitation, ruinant ainsi la messagerie implantée dans cet « œil ».

"Je n'aime pas être dérangée...."

Son regard s'assombrissant peu à peu, elle se saisit du bras de Kananera qu'elle traina sans retenue jusqu’à l'entrée du labo qui résidait dans la villa. Un petit coup d'oeil sur sa propre messagerie privée, et la voilà en possession du digi-code qu'elle compose avant d'entrer, traversant la pièce jusqu'au bureau, où étaient entreposées toutes les informations qu'elle souhaitait. Déposant la mutante blessée dans le couloir, elle copia rapidement le plus de dossiers possible avant de revenir vers elle, une vingtaine de minutes plus tard.

"Elle t'aimait, et maintenant tu peux me haïr."

Il était maintenant temps d'en finir, si Sernine avait bien fait sa part du marché, un clone d’Alinka lié par une puce jumelle attendait fermement cette nouvelle conscience, du côté du secteur 1.
Lentement, elle apposa le bout de son 9mm sur sa tempe, un sourire des plus malsains dessiné sur ses lèvres.

"À bientôt, qui sait."

Et c'est sur ces mots qu'elle acheva son calvaire dans un bruit sourd, la balle faisant étinceler une dernière fois son visage...