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EDC de Alice~51211

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III. ☺


(☺)
C'est la fin de toutes les sensations, malgré que les choses belles, celles qui sont éternelles, subsisteront dans ma mémoire ; il s'est endormi, mou, sur les canapés, étendu comme les ivrognes des rades obscurs, l'ivresse en moins, et puis son visage est resté sincère, lui, et son haleine est loin de l'alcool mais proche de mes lèvres. Je ne sais si il s'agit là d'une petite mort mais je continue à vivre tout de même, plus passive que jamais, car le sommeil comme une maladie a soumis mon corps à son joug écrasant, et l'énergie et la vie sont comme des ombres loin de mon esprit et de mes conceptions de pauvre mortelle ; comme tout en ville est mort, mais éveillé, comme les fleurs de plastique, celles qui ne fanent jamais, immortelles mais tristes, je me console par la plume et son crissement sur le papier. Du regard, un regard gris certes mais encore alerte alors malgré les cernes, je cherche et enquête partout en quête de sensations et de choses belles à soumettre à ma verve, ultime bastion de mon humanité et de mon existence sans doute, et le fil de mes pensées s'étiole comme quand l'esprit quitte le corps avant nos petites morts, même si tout cela n'est que métaphysique de puce, celles qui peuplent nos crânes, et la question de l'humanité s'impose alors, et de la mort, comment réellement mourir ?
Il y a bien la fosse, celle qui bée dans l'antre décrépie, celle qu'elle occultât de mon regard, je pourrais m'y jeter mais quitter Ren me fend le cœur, et se résoudre à mourir relève du plus grand courage, or j'ai toujours été faible, et la médiocrité comme une gangrène fut depuis jamais ma marque de fabrique, alors je ne fais qu'errer, et quotidiennement réduire au silence ma fenêtre sur le monde, mon communicateur, louant plus que jamais le smog de ne devoir plus rendre de comptes, l'âme à peine chagrine que nul ne remarque quelque départ de ma part, quelqu'absence, quelque décès dans mon corps ou mon âme. Je n'ai daigné lâcher aucun message pour excuser une telle mort sociale, et l'heure n'est pas aux aveux, car je ne suis pas prête à avouer que jamais je ne me suis sentie semblable à tous ces gens qui savent ce qu'ils font là et qui comprennent le monde et la vie et comment par le smog et les couilles des Enclism ils se sont retrouvés avec des responsabilités entre les mains, mes mains à moi sont fragiles et pâles, bonnes à rien et je n'ai jamais su ce que je foutais là, bordel de merde, je n'ai jamais su comment communiquer non plus et pourquoi chacun agissait comme si l'existence était normale et que chaque chose n'était pas incroyablement étrange et absurde.

J'ai toujours été étrangère au monde malgré mes efforts réalisés à la sueur de mon front et de mes larmes tout aussi salées pour m'entourer d'autres mal formés, mais le sursaut de compréhension n'a pas suffi, je suis singulière et plus nulle que chacun d'entre nous qui existent en même temps au fond de ce trou, coincés dans un cauchemar collectif ou je m'enfonce à m'entourer d'une communauté dans laquelle je ne m'intègre même pas, et même si le sud ouvre ses bras aux brisés et aux marginaux ça ne suffit plus, car un tel sentiment de solitude est phénoménal, sa force, je ne comprends plus rien, ni le monde ni moi-même, et tout est flou et absurde, comme si personne ne remettait plus rien en question, non les choses mondaines comme la politique ou la vie mais le simple fait d'exister en tant qu'individu et puis penser, et puis bouger ses orteils ou ressentir tous les sens, et pouvoir commander à chaque membre par la pensée relève de la sorcellerie, c'est comme répéter un mot jusqu'à ce qu'il perde de son sens, mais cela élevé au niveau de tout ce qui existe, et ça me paralyse d'effroi et me pétrifie comme le buste d'Imperator ou un comptoir de bar, un meuble ou Ren et Pavel endormis sur les canapés, et puis moi-même entre sommeil et éveil se ternit la frontière, se ternit mon visage et ma vie, et mes sens, à peine je sens son corps entre mes bras, et mon esprit s'évade, j'ai peur de ne plus le retrouver, et la cohérence, elle s'est évadée elle aussi, comme papier au vent à jamais

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La Narratrice
05 Juillet 2016
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