(♥)J'aurais voulu rédiger des symphonies, et que mes mélopées gravent les esprits de la marque indélébile de ton souvenir. Des récits épiques qui narreraient nos chevauchées, à deux ou à quatre, et toute la beauté de leur maladresse, nos balbutiements, nos genoux écorchés aux angles durs de Dreadcast, et le sel de nos larmes. Trouver les mots, peut-être, ceux à la hauteur de notre havre, de celui qui marqua nos vies de son emprunte éphémère, aussi puissants que nos cris et nos adieux d'un jours, de la rue Jumellet qui abrita la tempête et le calme. Quatre lacunaires formèrent un tout et s'y fondirent, figés dans l'euphorie d'avoir enfin trouvé les âmes sœurs et frères, dans celui de ne plus être seul dans le smog trop âpre et l'alcool au goût amer. D'aucuns par l'âge et d'autres par la jeunesse, l'existence nous avait égrainés pour mieux nous unir sous un toit d'anthracite, et tout en gris nous déclinions l'incomplétude, l'égarement, et tout en rires, en larmes et en haine, autant d'émotions risibles d'ici mais pleines et ardentes de là-bas, tout en haut, nous emplissaient. Mais je n'ai ni les mots ni le talent, celui d'agencer phrases et charme, et l'art de l'improvisation, c'était là ton domaine ; je ne peux qu'accoucher d'un maigre hommage, grêle et triste, aux mots patauds et trop larges, maladroits et imparfaits.
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Je ne fais plus que tâcher de larmes le papier et regretter jadis dan un cercle ou ses occupants sont à jamais, pleurant une toile à huit mains au goût de trop peu, inachevée. Nous faisions alors l'éloge des brisés, dont les élucubrations maladroites faisaient toutes leurs beautés, et de tout ce qui n'était parfait, et de tout ce qui n'avait connu de fin, mais j'aurais souhaité une complétude et l'infini pour toi, et pour nous, car tout cela est trop abrupt. Et tes secrets posthumes, et tes foyers occultes, dérisoires ils m'apparaissent, face à l'ouragan que tu me dévoilât, celui de ton for et de tes sentiments ; les regrets, inévitables, m'ébranlent, ceux de n'avoir, à nouveau, su exprimer ce qui reposait au fond de mon chef, l'amour, et non romantique, banal et commun, mais celui d'appartenance, et de reconnaissance, celui qui est éternel. Celui qui ne connaît le verbe et qui naît d'un miroir de soi, du sentiment d'enfin ne plus être la seule de son espèce, une espèce vouée à mourir trop tôt. Médiocre est mon tribut, mais médiocre je suis, et lâche, car ce n'est qu'ensuite que me vient la force d'en parler.
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Mais notre quatuor se perdit et s'installa l'indifférence, de laquelle seul m'extirpait un homme, et je cherchai refuge dans le travail, et l'appartenance, m'efforçant de faire un deuil que je m'étais interdit. Peut-être le passé accentue-t-il le ressenti, peut-être est-ce la nostalgie, car plus que jamais m'agressent les passions, et plus que jamais le passé m'enserre la poitrine. Ton retour n'a fait que raviver la mèche pour mieux l'éteindre ensuite, et ensuite plus noire est l'obscurité, lorsqu'on a connu la lumière. La mort de l'espoir m'a pris la gorge, et je redoute autrui, de peur de m'effondrer. La haine s'est évaporée, et la peine a pris sa place, car après tout, la septentrionne n'est plus et le second est mon semblable. La peine et le néant, celui qui emplissait mon appartement, et mon âme, et mon cœur, et le sien, celui qui embrasse le cœur de tous les hommes, aucun dialogue ne l'emplit, et les bras de l'homme ne font que l'anesthésier.
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Ton départ est modeste et discret, loin de ton admirable théâtralité, et humble et imparfait, tout comme tu le fus.
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Navrée de poster à des intervalles si rapprochés; loin de moi l'idée de vouloir rafler des étoiles. Je m'efforce ici de livrer un maigre hommage à des personnages qui ont autant marqué l'esprit d'Alice que le mien. Merci.
@Décrépitude @Arsen @Ilya