EDC de Akili~68612

Elle atterrissait sur le sol de terre battue couvert de poussière des ST. Il n’y a pas si longtemps que ça encore, elle avait l’habitude de se balader ici. Traverser les ST, déplacer les bestioles, naviguer entre elles avec patience. Elle alluma son module, et démarra. Elle avançait lentement, une main parfois posée sur les murs qui dégoulinait par moment d’humidité. Il y faisait parfois si sombre qu’elle avait l’impression d’avancer à l’aveugle. De temps en temps, elle s’immobilisait en entendant la démarche familière d’un rat mutant, ou leurs couinements. La dernière chose dont elle avait besoin, c’était qu’une de ces saloperies la charge dans les ST. Non, il fallait absolument qu’elle le rejoigne.

Les vieilles habitudes finirent vite par reprendre le contrôle, son pas redevint plus assuré, plus silencieux. Son esprit versa totalement dans le pragmatisme. Elle aperçut enfin un rat, dans l’une des salles dégagées et relativement lumineuse des ST, en train de festoyer sur une bouillie clonique. Probablement un pauvre gars du Militarium qui s’est fait avoir comme un bleu. On se faisait parfois avoir, elle ne dirait pas le contraire, mais s’il y avait bel et bien une façon de survivre aisément en ST, c’était en suivant un chef de patrouille. Elle s’est immobilisée dans le plus grand silence, évaluant la distance à laquelle elle pourrait sauter sans bruit, en espérant qu’une autre bestiole ne soit pas tapie dans l’ombre et la remarquerait. Mais non. Elle sauta une fois, deux fois, et elle était en sécurité. La bête ne fut plus qu’un souvenir aux bruits glougloutants qui mourraient dans son dos tandis qu’elle avançait plus ragaillardie encore par sa petite victoire.

Elle y était enfin. Elle n’avait plus qu’à attendre que le sas s’ouvre, aussi elle alla se cacher tranquillement dans la trappe, en silence toujours au milieu des mutants. Elle n’attendit pas longtemps avant de pouvoir remonter, et passer le sas.

Ah, le CM. De vieux souvenirs l’assaillirent tandis qu’elle constatait un peu trop lentement que le passage avait éteint son module. Elle le ralluma pour courir vers la planque qu’il lui avait indiqué.
Le SR est un vieil ami pour elle. Elle n’en a jamais détesté les murs, ni le sol, ni les bâtiments. Mais ô combien a-t-elle détesté se heurter à l’esprit étriqué des rebelles. A ces idiots qui se battaient contre la progression du plus grand nombre mais pour les avantages de leurs petites personnes et de leurs proches. Dans un sens, ils étaient comme les impérialistes, à servir leurs propres intérêts. Sauf que l’absence de réel cadre politique de la Rébellion participait énormément à diviser la population. Et, paraissait-il qu’actuellement ça allait beaucoup mieux, surtout depuis que Dran’, grâce à son poste d’LRCM bottait le cul des impérialistes depuis un petit moment. Elle se mit à sourire à l’idée de revoir ce qu’elle avait de plus ressemblant à une famille. Même si c’était encore un homme qui l’avait poussée à traverser les ST si rapidement pour le rejoindre, elle était heureuse à l’idée de les revoir eux.
Elle arriva au lieu de rendez-vous, et elle n’attendit pas longtemps avant qu’il apparaisse.

Son cœur fit un bond dans sa poitrine, comme à chaque fois qu’il est enfin là. Elle se redressa, assise dans le canapé pour le regarder. Elle mourrait réellement d’envie de sauter d’un bond et aller l’enlacer, humer son odeur de tabac, d’alcool et de musc. De l’embrasser et céder ainsi au fruit défendu qu’elle était la seule à se refuser avec lui. Mais ça ne se passait jamais comme ça avec lui. Il n’y avait jamais d’effusions sentimentales. Elle ne lui montrait jamais complètement à quel point elle tenait à lui, à quel point il lui retournait la tête et lui meurtrissait le cœur. Mais cette fois, elle était un peu plus apaisée. Elle était fatiguée à vrai dire. Son cœur n’était plus capable de grand-chose, et elle avait perdu le goût de la vie. Pourtant elle était là, à se parjurer pour être avec lui, et l’aider dans son projet.

Il avait toujours ce même sourire narquois et bourré de charme qui la faisait fondre, et déglutir bruyamment, car cela faisait trembler les parois de la carapace sous laquelle elle essayait de se cacher, en vain la plupart du temps, beaucoup trop sensible. Il s’installa à l’opposé de la pièce, tranquillement. Il adorait ça, jouer au chat et à la souris avec elle. Elle était presque sûr qu’il aurait aimé l’entendre le supplier de venir plus près, l’entendre quémander son toucher. Et d’un autre côté, c’était précisément ce qu’elle ne devait pas faire, sinon elle aurait été pour lui comme toutes les autres. Il aimait sans aucun doute qu’elle soit si fière et se respecte à ce point. Il aimait aussi énormément qu’elle tienne à lui au point parfois de ne toucher que lui, même pendant des années d’absence. Au final, c’était un vrai connard, car il ne faisait que jouer avec elle. Même si ce qui lui plaisait particulièrement c’était qu’elle ne cède pas.

Ne la voyant pas bouger, il finit par s’approcher, et effleurer ses cheveux du bout des doigts. Elle ne put s’empêcher de les attraper avec délicatesse et déposer un baiser aussi léger qu’une fleur dessus.
Puis il s’en alla, promettant de revenir vers elle cette nuit. Un mensonge de plus, venant d’un homme pleinement conscient de son effet. Elle ne releva jamais, ne souhaitant pas tomber dans l’archétype de l’amante jalouse sans légitimité.