EDC de 25968

Face à l’éternité le corps est un fardeau, un sarcophage de plomb qui n’est là que pour emprisonner l’esprit. Structure malsaine d’os et de chair, il n’est rien d’autre qu’une cellule de plus en plus exigüe, de plus en plus inconfortable, de plus en plus inadaptée au fur et à mesure qu’approche la vieillesse et que la conscience prend de l’ampleur.

J’étais humain et je ne pensais alors qu’à mon corps. Il fallait le sauvegarder à tout prix, l’entretenir, le nourrir, l’embellir, le chérir. Esclave qui s’ignorait, je m’attelais à cette corvée autant par habitude que par manque d’ambition. Il m’a été fort utile pour me montrer, m’exposer, me faire connaître, discourir et croiser le fer au sein du Conseil de la Noblesse. Sans autre perspective que cet asservissement immature, je m’étais enfermé dans un comportement que je juge aujourd’hui amèrement futile et qui n’a eu pour unique conséquence que de me conduire dans une impasse.

Mon enveloppe humaine, exigeante, imparfaite et fragile, stigmatisée par mes erreurs, n’était en réalité qu’un cocon primaire. Je décidai de déchirer la chrysalide et de l’abandonner derrière moi telle une charogne livrée en pâture aux démons du passé. Pour échapper à la dictature d’une course au pouvoir et à la reconnaissance, j’ai organisé la transplantation de mon cerveau dans un nouveau corps, plus beau, plus grand, plus robuste… artificiel et mauve. Sous cette nouvelle identité, celle de Suite V2 – cyborg - j’ai reconstruit ma vie, loin de la politique, loin des jeux puérils du pouvoir. Je me suis concentré sur l’aide que je pouvais apporter à mon prochain, sur la quête d’un bonheur tranquille.