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3. Liber Prohibitus
Scientia Potentiam est.
Maxime ressassée par le curieux, psalmodiée par le soupçonneux, moquée par la brute.
Sentence motrice de quiconque établit les priorités énoncées par Neferia Imponite (1) il y a bien longtemps :"La nécessité d'avoir des informations, et pour cela, de les chercher; la nécessité de lutter contre les rumeurs; celle de préserver certains secrets ; enfin le besoin relatif de communiquer des informations à la population."
Information, communication, partages et silence. Échanges de stimuli sensoriels, attaques de la voix et parades gestuelles, estoc d'un regard, de taille, feinte d'un soupir. La danse de l'interaction s'épanouit sous des milliers de formes et la rejeter devient, en soit, communication. On interprète le rien, on cherche à percer la barrière du prolixe. Mêler le vrai au faux, volontairement ou non, fait partie du divertissement humain.
Sans parole, pas d'échange.
Sans silence, pas de société.
L'Humanité repose sur l'hypocrisie. Une société franche, directe et ouverte est condamnée à la discorde et au chaos. Émotion d'un instant, fureur d'un dédain : viol et parole riment et dansent de concert. On ne peut pas fermer l'oreille. Et si l'on n'écoute pas, on entendra toujours.
Maxime ressassée par le curieux, psalmodiée par le soupçonneux, moquée par la brute.
Sentence motrice de quiconque établit les priorités énoncées par Neferia Imponite (1) il y a bien longtemps :"La nécessité d'avoir des informations, et pour cela, de les chercher; la nécessité de lutter contre les rumeurs; celle de préserver certains secrets ; enfin le besoin relatif de communiquer des informations à la population."
Information, communication, partages et silence. Échanges de stimuli sensoriels, attaques de la voix et parades gestuelles, estoc d'un regard, de taille, feinte d'un soupir. La danse de l'interaction s'épanouit sous des milliers de formes et la rejeter devient, en soit, communication. On interprète le rien, on cherche à percer la barrière du prolixe. Mêler le vrai au faux, volontairement ou non, fait partie du divertissement humain.
Sans parole, pas d'échange.
Sans silence, pas de société.
L'Humanité repose sur l'hypocrisie. Une société franche, directe et ouverte est condamnée à la discorde et au chaos. Émotion d'un instant, fureur d'un dédain : viol et parole riment et dansent de concert. On ne peut pas fermer l'oreille. Et si l'on n'écoute pas, on entendra toujours.
Stilicon glisse sa main sur la couverture usée par le temps. La chasse et la coiffe de l'ouvrage sont usées, dévorées par les ans et la vie assaillant le passé. Les nerfs du livre -ces saillies scandant le dos des reliures anciennes- sont à peine sensibles. Le Lord frémit, peinant à fermer les paupières. Il veut contempler sans attendre davantage. Ses genoux lui semblent trop frêles pour le poids de tant d'informations. Il retire ses gants. Un sourire hystérique le saisit, défigurant l'impassibilité qu'il arbore de coutume. Ses mains nues effleurent le fruit de la mémoire des hommes.
Du tympan à la cochlée en passant par l'étrier, le son virevolte dans l'organe de l'Homme et le met en phase avec le fracas du monde. Le biologiste décrira un cheminement jusqu'à l'encéphale, plus précisément jusqu'au sillon latéral ou sillon de Sylvius. Tiens, Cyrius, Sylvius...
Plus prosaïquement, chacun sait que la destination finale de la parole ou du son n'est pas le cortex, mais l'âme. Surprise, peur, colère, espoir, amour, reconnaissance, indifférence... vaste cloaque en ébullition attendant qu'arrive l'onde qui déterminera où roulera l'écume. Équation difficile prévisible, où les conjonctures sont multiples.
Plus prosaïquement, chacun sait que la destination finale de la parole ou du son n'est pas le cortex, mais l'âme. Surprise, peur, colère, espoir, amour, reconnaissance, indifférence... vaste cloaque en ébullition attendant qu'arrive l'onde qui déterminera où roulera l'écume. Équation difficile prévisible, où les conjonctures sont multiples.
Le lord abaisse ses narines vers la relique, la redressant légèrement. Il sent la tête du livre, emporté par des odeurs de déchets, de sueur et d'encre artificielle. Le temps remonte ses sinus. Ses battements de cœur s'accélèrent. Non, l'ouvrage n'est pas une copie. Non, il ne vient pas de la Bibliothèque impériale. Soulevant légèrement les feuillets assemblés, il en mesure la légèreté. Il sait pourtant que rien n'est plus lourd que ce qui se trouve à l'intérieur.
"Authentique..."
"Authentique..."
Le vrai, le faux. Notions abstraites qui se concrétisent pourtant par des actes confus. C'est une banalité de dire que la vérité, comme la liberté, n'existe pas. Il existe des vérités, il existe des libertés. Il est rare que les hommes sachent le vrai, car la vérité est et sera équivoque, équivoque et redoutable. C'est ainsi qu'elle se révèle : indéfinie, protéiforme, invisible, mais toute-puissante.
Le faux, lui, est plus catégorique, et son propre est de passer pour vrai aux hommes. On peut prouver qu'une assertion est fausse, mais qui peut dire qu'aucun silence n'entache une vérité réconfortante...mais incomplète.
Le doute et le soupçon sont répétés, et la répétition fonde l'assertion.
Un fait authentique est un fait mathématique. Un tueur et une victime réduisent le deux à un. Mais l'homme n'est pas une arithmétique, et sa parole est plus pernicieuse qu'un meurtre.
Le faux, lui, est plus catégorique, et son propre est de passer pour vrai aux hommes. On peut prouver qu'une assertion est fausse, mais qui peut dire qu'aucun silence n'entache une vérité réconfortante...mais incomplète.
Le doute et le soupçon sont répétés, et la répétition fonde l'assertion.
Un fait authentique est un fait mathématique. Un tueur et une victime réduisent le deux à un. Mais l'homme n'est pas une arithmétique, et sa parole est plus pernicieuse qu'un meurtre.
Le moment de l'ouverture est toujours le plus bref et le plus exaltant. Léger bruissement de folios encore collés. Craquement de côte inquiétant le lecteur précautionneux. La masse se répartit, le poids reste le même. Pourtant, Stilicon Oakenshield est plus tremblant que jamais. Ses yeux parcourent la page d'ouverture en une première impression. Une transgression vertigineuse, un viol sans victime, une main tendue au disparu. Le silence est oppressant, les regards sont partout. C'était avant que Stilicon ne configure Eumée. Il était seul dans un petit appartement, dans une rue qui portait le nom d'un homme qui devait marquer sa vie près de deux années plus tard : Hector Calver.
La rétine et les photorécepteurs de l’œil fonctionnent à plein rendement. Merveilleuse alchimie que celle de l'homme en quête de secrets. Mouvements latéraux du visage, inspirations de plus en plus lentes, mains moites, déglutition difficile.
L'information circule. A ce stade, pas de vrai, pas de faux.
L'information circule. Elle est traitée.
L'information circule. Elle est assimilée.
Vient le grondement sourd des phonèmes et des syllabes, l’entrechoquement terrible des mots surgissant de pages jaunies par les cycles annuels. Les phrases livrent la thèse. Chaque paragraphe l'articule. La pensée est exposée, mise à nue. Le voile glisse sur les mystères de l'écrit, et livre une Vérité. Celle d'un Homme qui murmure à son semblable au delà du temps et de l'espace. Les pages se tournent en un frôlement lent et terrifiant. Les pages défilent et le le lecteur court, toujours plus vite, vers sa fin. Le sang s'agite et reflue dans les tempes : signe d'émotion.
L'information circule. A ce stade, pas de vrai, pas de faux.
L'information circule. Elle est traitée.
L'information circule. Elle est assimilée.
Vient le grondement sourd des phonèmes et des syllabes, l’entrechoquement terrible des mots surgissant de pages jaunies par les cycles annuels. Les phrases livrent la thèse. Chaque paragraphe l'articule. La pensée est exposée, mise à nue. Le voile glisse sur les mystères de l'écrit, et livre une Vérité. Celle d'un Homme qui murmure à son semblable au delà du temps et de l'espace. Les pages se tournent en un frôlement lent et terrifiant. Les pages défilent et le le lecteur court, toujours plus vite, vers sa fin. Le sang s'agite et reflue dans les tempes : signe d'émotion.
Vient l'explosion de la compréhension. Le savoir et l'effroi.
Stilicon Oakenshield vient de poser les yeux sur le passé de l'Homme. Il a vu l'Imperium au fond des yeux, et s'en trouve marqué à jamais. Lorsqu'il fermera Le Livre, ses épaules s’affaisseront, son visage se fermera, l'exaltation de la découverte s'en trouvera dissipée. Tout accomplissement suppose le taedium, le dégoût, la période réfractaire qui succède à l'extase de la conquête. Parce que la lecture est le contentement vivifiant du curieux, tout récit achevé est une petite mort.
Stilicon Oakenshield sait.
Stilicon Oakenshield sait.
Scientia est potentiam. Mais si le savoir est l'arme du potentat, l'ignorance est parfois la défense de l'homme libre. Enchaîné par une réalité, il convient alors de la modifier. Est-ce mentir que de changer le cours de ce qui fut, et de taire ce qui ne doit pas être su ?
Liber prohibitus, le livre interdit. Le savoir, astre ravageur qui brûle qui s'obstine à toujours l'étreindre.
Stilicon a vu l'Imperium au fond des yeux. A lui de le supporter et de vivre avec. Pour l'Imperium. Pour l'Humanité. Pour lui-même.
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Informations sur l'article
[RP] "Intus et in cute"
04 Août 2012
1346√
7☆
3◊
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◊ Commentaires
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L-X (1536☆) Le 05 Août 2012
"Si tu plonges longtemps ton regard dans l'abîme, l'abîme te regarde aussi..." -
Manerina~6356 (1552☆) Le 05 Août 2012
Si tu continues, j'adhère au fan club! Très belle plume, un vrai plaisir!